Qu’appelons-nous aujourd’hui « dépression » ?

La question est complexe. D’après le DSM-5, le manuel de référence sur les troubles mentaux, le trouble dépressif majeur est défini par neuf symptômes [voir la liste en poster]. Pour être considéré comme dépressif, il faut présenter au moins cinq de ces symptômes, et obligatoirement l’un des deux premiers, à savoir l’humeur maussade et l’anhédonie, soit l’incapacité de ressentir le moindre plaisir.

Si la définition de la dépression est floue, il ne faut pas pour autant en déduire qu’elle n’est qu’une construction arbitraire du milieu psychiatrique.

Quelles sont les différences principales entre la dépression et le simple fait d’avoir le blues ?

Le « critère de proportionnalité » aide à faire la différence. La détresse, le vide, l’engourdissement ressenti est-il disproportionné par rapport aux événements ? Mais il faut aussi poser la question de sa durée et de sa gravité : au bout de combien de temps la détresse psychique liée à un événement douloureux se mue-t-elle en maladie clinique ? Les réponses varient selon les personnes, selon les cultures. Chaque culture a, par exemple, une idée différente de la durée normale d’un deuil après la perte d’un conjoint. Certains confrères s’inquiètent du fait que nous traitions ce que l’on appelait autrefois les problèmes normaux de la vie comme des affections médicales. Je ne nie pas cette surmédicalisation, mais les gens ont le droit de vivre sans souffrir. Si un traitement les aide à le faire, pourquoi pas ? Rappelons aussi que dans le monde industriel occidental, où nous ingérons probablement trop de médicaments psychiatriques, nombreux sont ceux qui restent sous-médicalisés, par manque d’accès à un traitement satisfaisant.

« Il n’est pas évident que nous vivions une époque plus déprimante que les précédentes »

La dépression a-t-elle toujours existé dans l’histoire de l’humanité ?

Cette question divise les historiens. J’ai personnellement tendance à penser que ce type de maladie fait partie de la vie humaine, et ce depuis un certain temps. Les premiers textes d’Hippocrate font déjà référence à des maladies d’extrême tristesse. Mais d’autres vous dir

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