La pandémie mondiale que nous venons d’essuyer a quelque peu rebattu les cartes au sein de la puissante industrie de la mode. Pas pour les grands groupes, qui ressortent vainqueurs de cette crise ; ni pour les travailleuses du textile, qui subissent les pertes d’emploi dues à la mauvaise volonté des donneurs d’ordre. Mais plus sûrement du côté de l’avenir de la mode : les jeunes créateurs intègrent de plus en plus la durabilité et l’inclusivité dans leurs créations, par le surcyclage ou par le choix de matières naturelles et renouvelables qui, a minima, ne rejetteront pas de nanoparticules de plastique dans les océans. Côté innovations textiles, ces créateurs peuvent s’appuyer sur des matériaux souples qui constituent une alternative au cuir naturel, montré du doigt pour son empreinte environnementale, et toxique lors de sa transformation – et ce même s’il reste la matière la plus durable dans le temps. Ces innovations restent à prendre avec des pincettes, cependant certains produits fabriqués à partir de déchets de l’industrie alimentaire (raisin, pomme, ananas) renferment, eux aussi, des plastiques très polluants comme le polyuréthane. L’espoir renaît avec le Bananatex, issu comme son nom l’indique de la banane, et qu’on nous assure totalement biodégradable. Tout comme les propositions de l’entreprise Pyratex qui développe des toiles écologiques faites de fibres végétales (kapok, ortie, abaca, algue ou bois) aux promesses alléchantes : antibactériennes, celles-ci absorbent transpiration et UV, assurent respirabilité et thermorégulation. Enfin, sur la plus haute marche du podium : le champignon ! On nous le promettait depuis une décennie, le voici habillant les mannequins des défilés de Stella McCartney, chantre de la haute mode végane. Antibactérien et imperméable, le champignon se plie aux aléas du style.

Et le consommateur dans tout ça ? De plus en plus préoccupés par la transparence des marques, les questions de droits de l’homme, de bien-être animal et d’impact sur l’environnement, 66 % d’entre nous se disent prêts aujourd’hui à soutenir les marques engagées. Du déclaratif, certes, mais parallèlement, nous constatons une augmentation des formes alternatives de consommation de vêtements : réutilisation, location et troc. Selon GlobalData, le marché de la seconde main a connu une croissance vingt et une fois plus rapide aux États-Unis que les autres types de vente de vêtements au cours des trois dernières années. Le rapport ThredUp sur la seconde main prévoit que ce marché triplera en dix ans pour passer de 24 à 64 milliards de dollars (contrairement à la fast fashion dont les parts de marché baisseraient à 44 milliards de dollars). Les trocs de vêtements sortent du cercle amical et s’organisent pour donner à nos vestiaires une deuxième, troisième, voire quatrième vie. Ce type d’échanges, considéré comme un antidote à l’énorme problème de gaspillage de la mode, donne une chance de renouveler sa garde-robe à moindres frais sans se fournir auprès de marques qui ne correspondent pas ou plus à nos valeurs.

Dans le cercle de l’intime, la réparation a également son rôle à jouer. En une seule génération, nous avons perdu les savoir-faire du quotidien : réparer, broder, rapetasser… Or, ces termes oubliés reviennent au fil d’ateliers qui séduisent les plus jeunes. Un rapport émotionnel à notre garde-robe qui nous rappelle que, comme l’écrit Orsola de Castro dans son récent livre Choisir une mode durable, « le vêtement le plus écologique est déjà dans notre placard ». 

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