Trente ans après la déclaration et le programme d’action de Pékin qui, à l’issue de la quatrième conférence mondiale sur les droits des femmes, fixait des objectifs ambitieux pour atteindre l’égalité de genre, les droits des femmes et des minorités de genre n’ont jamais été aussi menacés, attaqués, bafoués partout dans le monde. Sept ans après #MeToo, le backlash – terme popularisé par l’essayiste américaine Susan Faludi, souvent employé depuis pour désigner un « retour de bâton » réactionnaire – est bel et bien là. Mais si cette « guerre froide contre les femmes » n’a en réalité jamais cessé, l’élection de Donald Trump est à cet égard un signal funeste et la marque d’une brutale offensive.

Durant son premier mandat, en nommant trois juges conservateurs à la Cour suprême, il avait ouvert la voie à l’annulation, en juin 2022, de l’arrêt Roe vs Wade garantissant le droit à l’avortement au niveau fédéral. Il n’a pas manqué de donner le ton du second lors de son discours d’investiture, en signant des décrets en rafale contre les droits humains. Fin de la reconnaissance légale des personnes transgenres, fin des programmes Diversité, équité et inclusion (DEI) dans l’administration et les entreprises, liste de mots – dont « femmes », « filles », « LGBTQI+ », « genre » – à ne pas employer au sein du service EducationUSA chargé des étudiants étrangers aux États-Unis, suppression de données publiques et arrêt de recherches en médecine, en sciences humaines et sociales relatives à ces thèmes… : toutes ces mesures s’inscrivent dans « l’extrême droite ligne » du Projet 2025 porté par l’Heritage Foundation.

C’est la feuille de route de ce think tank réactionnaire visant le démantèlement de l’État-providence et de l’administration que Donald Trump et son vice-président, J.D. Vance, farouche opposant à l’IVG et aux droits LGBTQI+, mettent méthodiquement en œuvre, appuyés par l’un de ses rédacteurs, Russell Vought, à la tête du Bureau de la gestion et du budget, et par Elon Musk, au Département de l’efficacité gouvernementale.

En matière de politique étrangère, Trump a ainsi rétabli la « règle du bâillon mondial » (Global Gag Rule), comme il l’avait fait en 2017. Instaurée par Ronald Reagan en 1984 avant d’être traditionnellement désactivée par les démocrates, elle interdit tout financement relatif à la planification familiale auprès des ONG internationales. Le leader MAGA a aussi mis à l’arrêt l’Usaid – l’un des premiers bailleurs mondiaux pour le développement international. L’Institut Guttmacher estime que ce gel, même s’il ne s’étend pas au-delà de la durée annoncée de 90 jours, privera de soins, en matière de santé sexuelle et reproductive, 11,7 millions de femmes et de filles dans le monde et provoquera le décès de 8 340 d’entre elles du fait de complications consécutives à une grossesse ou à un accouchement.

Car les ultraconservateurs souhaitent en effet aller encore plus loin dans leur haine des femmes, en s’opposant à la pilule abortive et à son envoi postal, en criminalisant toute personne qui aiderait à la pratique d’une IVG, en faisant reconnaître le fœtus comme personnalité juridique. À nouveau signataires de la Déclaration de consensus de Genève aux côtés d’une trentaine d’États hostiles à l’IVG, les États-Unis comptent en faire une pierre angulaire de leur diplomatie. Pour cela, ils retrouveront sur la scène internationale leurs alliés d’extrême droite, Giorgia Meloni, Javier Milei ou encore Viktor Orbán lors de la prochaine Commission de la condition de la femme qui aura lieu dans quelques jours au siège des Nations unies.

Face à cette coalition internationale anti-droits, il est urgent que les États qui portent un agenda progressiste sur ces questions se mobilisent autour d’une diplomatie féministe et soutiennent la société civile féministe et LGBTQI+. 

Vous avez aimé ? Partagez-le !