Quotidienne

« Abolition », par Antonio A. Casilli

Antonio Casilli, sociologue

Marie Deshayes, journaliste

Quel est le point commun entre la lutte contre l’esclavagisme, contre la prolifération des armes nucléaires et contre le manque de contrôle des algorithmes ? C’est, à chaque fois, la volonté d’abolir une institution disciplinaire, nous dit le sociologue spécialiste du numérique.

« Abolition », par Antonio A. Casilli

Dans une situation de risque de guerre nucléaire, il est important de rappeler l’histoire du mot abolition. Prenons la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (Ican), qui existe depuis quinze ans et avait reçu le prix Nobel pour la paix en 2017. Sa visée est radicale : non seulement interdire, mais « abolir » les armes atomiques.

Cette campagne se rattache à un mouvement beaucoup plus vaste et plus ancien : celui qui, du combat pour l’abolition de l’esclavage au XVIIIe et XIXe siècle, conduit à la lutte contre la peine de mort, contre le système pénal et la police. Il s’agit d’un mouvement très varié, dont la visée politique est la suppression d’institutions perçues comme des formes de répression, ainsi que des sources d’injustice et d’inégalités sociales.

Pour les abolitionnistes, la peine de mort et les prisons sont considérées comme une de prolongation de l’esclavage. Comme celui-ci, elles punissent et disciplinent les corps de populations opprimées. Aux États-Unis, la population carcérale est énorme et très inégalement répartie ; les personnes racisées sont surreprésentées. Les prisonniers sont, de plus, encouragés à travailler

14 mars 2022
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