Quotidienne

« Marchandise », par Sonia Devillers

Sonia Devillers, journaliste

À partir de 1958, la Roumanie communiste organise un système de troc à grande échelle : via des passeurs, elle achète du bétail et vend des visas de sortie à des citoyens juifs. Journaliste sur France Inter, Sonia Devillers raconte cette histoire qui a touché sa famille au premier chef dans Les Exportés (Flammarion).

« Marchandise », par Sonia Devillers
Pascal Ito / Flammarion

Il est des mots qui surgissent du passé et vous font grandir. Simplement parce qu’ils sont prononcés. Enfin prononcés.

En décembre 1961, ma mère (elle avait 14 ans), ma tante, mes grands-parents et mon arrière-grand-mère parviennent à quitter la Roumanie. Un passeur leur a obtenu des papiers, s’est assuré qu’ils franchissent le rideau de fer et qu’ils puissent passer à l’Ouest. Tout cela leur a coûté de l’argent, beaucoup d’argent. Mon grand-père remboursera longtemps. Ils savent donc qu’ils ont payé pour fuir un régime communiste. Ce qu’ils ignorent, c’est qu’ils ont été vendus par ce même régime communiste. Oui, vendus comme de vulgaires marchandises. Des êtres humains étiquetés, négociés, monnayés.

« En découvrant le nom de mes grands-parents dans ces registres, je fus prise de vertige »

Il faudra attendre des décennies pour que l’affaire soit révélée. Il faudra que tombe le Mur et que les archives de la police politique roumaine s’ouvrent. On y

11 September 2022
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