Quotidienne

Annie Lalalove : « J’avais soif de musique européenne »

Florian Mattern, journaliste

[Une semaine aux Francos 3/7] Côte d’Ivoire, Éthiopie, Guinée, La Réunion puis la France métropolitaine : la chanteuse, qui se produit ce mercredi aux Francofolies de La Rochelle, nous emmène faire un tour de son enfance musicale.

Annie Lalalove : « J’avais soif de musique européenne »
photo Piergab

D’où venez-vous ? Où avez-vous grandi ?

Ma mère est guinéenne et mon père breton : voilà d’où je viens. J’ai passé toute mon enfance en Afrique, je suis née en Côte d’Ivoire, puis j’ai habité en Éthiopie, en Guinée et à La Réunion avant de partir en France métropolitaine. Mon père était fonctionnaire dans la coopération française, donc cela l’amenait à changer de poste régulièrement. Mais malgré toutes ces années passées en Afrique, j’ai toujours eu un point d’attache en France grâce à la maison que ma famille avait là-bas, dans laquelle on allait tous les étés.

Quel rapport entretenez-vous avec cette période de votre enfance ?

Je ressens beaucoup de nostalgie en repensant à cette période. J’ai vraiment l’impression d’avoir eu une enfance dorée, j’ai beaucoup été protégée de la misère autour de moi, notamment en Éthiopie. Je ne garde que de bons souvenirs de cette période, de ces voyages. Tout cela m’a enrichi et ouvert l’esprit.

« Lorsque j’étais en Guinée, j’achetais des cassettes sans savoir que ça n’était que des copies et des reprises »

Quelle musique écoutiez-vous à ce moment-là ?

J’écoutais vraiment de tout. À la maison, ma mère écoutait surtout du jazz et mon père des chants de marins, pendant que moi j’écoutais Chantal Goya, la Compagnie créole et, plus tard, Michael Jackson. C’était très diversifié ! Indirectement, on écoutait aussi de la musique africaine, notamment éthiopienne, qui est très particulière et totalement indescriptible. J’ai souvenir d’avoir dansé sur ces rythmes-là aussi et cela m’a sûrement influencée inconsciemment. Avoir connu des cultures différentes était intéressant pour le métissage de ma musique.

Cela a-t-il influencé votre développement musical ?

Je pense que cela m’a surtout permis de m’ouvrir à plusieurs styles de musique car je ne pense pas que la musique guinéenne ou éthiopienne se retrouve dans ma musique aujourd’hui. J’avais surtout soif de musique européenne ! Je pouvais passer des heures à regarder des cassettes de Jean-Jacques Goldman ou Vanessa Paradis. J’ai aussi un souvenir très fort de ma découverte de Video Killed the Radio Star des Buggles.

Quelles ont été vos découvertes musicales en arrivant en France ?

Plutôt qu’une rupture, mon arrivée en France s’est inscrite dans une certaine continuité musicale. Lorsque j’étais en Guinée, j’achetais des cassettes sans savoir que ça n’était que des copies et des reprises, de fausses Vanessa Paradis enregistrées avec des orchestres en fond. La vraie découverte a été la voix originale des artistes que j’avais écoutés toute mon enfance. Même si je baignais dans la culture africaine, j’ai toujours ressenti une attirance particulière pour la musique européenne. Comme mon père était professeur d’anglais, je lui avais demandé de m’apprendre la langue pour que je puisse comprendre les morceaux que j’écoutais.

Cet héritage multiculturel se retrouve-t-il en filigrane dans vos chansons ?

Je ne m’en rendais pas compte mais vivre en Afrique a été une expérience humaine très riche. J’y ai découvert une humilité et une générosité incroyables, une façon de vivre en gardant le sourire malgré la pauvreté qui m’a apporté une certaine candeur et une innocence qui se retrouvent aujourd’hui dans ma musique.

« Lors d’un concert, un spectateur m’a dit que je lui avais fait un massage de l’âme : c’est cela que je veux faire ! »

Je peux me permettre cette légèreté-là dans mes textes, en insistant sur les choses simples mais essentielles que les gens oublient trop souvent. J’essaie de faire une musique épurée parce que je trouve que plus il y en a, plus cela cache quelque chose. Je veux simplement transmettre de la douceur et faire du bien aux gens. Lors d’un concert, un spectateur m’a dit que je lui avais fait un massage de l’âme : c’est cela que je veux faire !

Vous chantez la plupart de vos chansons en anglais plutôt qu’en français : pourquoi ?

Sans trop savoir pourquoi, j’ai toujours été attirée par l’anglais. Les sonorités me parlent naturellement et quand j’écris, tout me vient en anglais. Je trouve que cette langue convient mieux aux styles pop et soul. Je ne suis pas assez satisfaite des chansons que j’ai pu écrire en français, je trouve que la langue est trop exigeante et que ça ne colle pas avec ma musique. Lorsqu’on fait de la musique solaire en français, cela peut rapidement prendre une tournure « Disney ». Et avec l’anglais, on peut dire beaucoup de choses avec peu de mots, au contraire du français qui est moins fluide.

Quel groupe ou artiste aimeriez-vous aller écouter aux Francofolies, qui commencent ce mercredi 13 juillet ?

Malheureusement, je serais obligée de partir dès le lendemain mais il y a Calogero et Asaf Avidan ce soir-là que j’aime beaucoup. Sinon je serais allée voir Juliette Armanet, dont je suis fan, et Julien Doré, qui est apparemment incroyable sur scène, mais aussi Angèle et Hoshi. Cette dernière m’avait bluffé lors de son concert au Zénith.

Une recommandation de chanson pour l’été ?

Ma chanson Boom Boom Shack ? (rires) Sinon, Le Dernier Jour du disco, de Juliette Armanet ou Meet the moonlight de Jack Johnson.

Et une chanson pour voyager ailleurs ?

C’est difficile de choisir mais la première chanson qui me vient en tête c’est Dreams de Fleetwood Mac. Un classique à réécouter…

 

Conversation avec FLORIAN MATTERN

13 juillet 2022
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