La période du confinement a été marquée par un vaste exode urbain. La crise sanitaire s’est-elle traduite par une forme de rejet des grandes villes et de leur modèle ?

Nous avons peu de recul encore pour juger de la réalité de ces départs. Est-ce une fuite de la ville ou simplement une fuite de sa densité et des risques sanitaires que celle-ci implique ? Le fait est que le coronavirus s’est d’abord implanté dans ces grandes métropoles, caractérisées par leur concentration de populations, d’équipements et de services. Mais la crise a aussi révélé au grand jour les défauts souvent accolés à la vie urbaine – trop bruyante, trop chère, trop sale, trop petite, trop bétonnée… Les mouvements de départ constatés depuis mars ne sont donc pas uniquement sanitaires. Ils sont un nouveau moment d’un mouvement plus vaste, qui a poussé les classes moyennes hors des grandes métropoles mondiales, faute de pouvoir y trouver des conditions de vie agréables. Cette opposition n’est pas nouvelle, bien sûr – Goldoni évoquait déjà au XVIIIe siècle les bienfaits de la villégiature face à la ville. Aujourd’hui, l’opposition se fait entre les mégapoles modernes et l’urbanisation dispersée, le style de vie rural.

Cet exode urbain peut-il se poursuivre dans les années à venir ?

La grande ville est le lieu où vous pouvez, normalement, multiplier presque à l’infini les interactions sociales. La sociabilité est son fondement et son essence. Or les dispositions prises ces derniers mois pour rompre les chaînes de contact vont à l’encontre de cette conception de la ville comme lieu de communauté, de rencontre, de loisir et d’échange. Si vous perdez la possibilité de développer des sociabilités, alors vous pouvez vous demander pourquoi rester en ville. Mais le départ d’une grande part de la population vers les zones rurales serait un risque pour ces dernières, car il impliquerait de construire davantage encore de bâti, et donc de rogner les espaces naturels. Je préférerais l’on développe l’agriculture urbaine, plutôt que de déplacer les urbains vers la campagne.

Les villes sont-elles capables de se réinventer ?

La ville n’est pas un objet figé, c’est une matière souple, qui évolue

Vous avez aimé ? Partagez-le !