Poète et critique d’art, Guillaume Apollinaire considérait que la place des statues africaines était au Louvre. Il aura fallu un siècle pour qu’un musée national pose sur elles un regard qui ne soit ni folklorique ni ethnographique. Un siècle pour que l’on comprenne que ces statues appartiennent irrévocablement au monde de l’art. Un siècle pour que l’on donne raison à Picasso, Derain et quelques autres, fascinés par le jeu des formes et la force tellurique des sculptures et des masques africains. Ils ressentaient une émotion profonde à leur contact, éprouvaient la certitude que leur puissance touchait au sacré.

Il faut avoir cela en tête en entrant au musée du quai Branly-Jacques Chirac pour visiter l’exposition « Ex Africa. Présences africaines dans l’art d’aujourd’hui ». Philippe Dagen, son commissaire, nous propose en effet une suite logique de ce choc esthétique dans le monde globalisé d’aujourd’hui. Une excursion inédite dans la production d’artistes africains et occidentaux – noirs, blancs et métisses –, qui s’inspirent des arts africains classiques. On mesure soudain à quel point les grandes œuvres africaines du passé ont marqué de leur empreinte leur vision du monde. Et on admire comment tous ces peintres et ces sculpteurs sont parvenus à s’approprier les codes de cet art dans un respect souvent espiègle, parfois bravement sacrilège, en hommage subtil aux productions de leurs aînés inconnus.

En partenariat avec le musée du quai Branly, ce numéro exceptionnel veut servir d’introduction à cette fête artistique et intellectuelle : trente-quatre artistes contemporains sont exposés – de Jean-Michel Basquiat à Annette Messager, de Chéri Samba à Emo de Medeiros –, et leurs œuvres montrées en majesté. À cette occasion, les organisateurs ont demandé aux artistes de répondre à un questionnaire sur leur rapport avec les arts africains classiques, ainsi que sur un sujet sensible : faut-il ou non restituer à leur pays d’origine les œuvres du patrimoine d’Afrique détenues en Occident ? Nous reproduisons dans le poster les réponses de quatre d’entre eux : Kader Attia, Myriam Mihindou, Romuald Hazoumè et Pascale Marthine Tayou.

Mais assez parlé ! Une exposition ne se raconte pas. Il faut la voir. 

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