FORÊT DE CÈDRES au cœur-de-lion, gonades pour notre tonnerre,
Même si tu es très loin, nous t’invoquons :

Donne-nous les têtes creuses des tambours longs…

Antilope pour la forêt de cèdres, messagère plus rapide
Que la flamme fulgurante du phare, nous t’invoquons :

Cache-nous sous ta peau ; délivre-nous de notre nudité…

Bouquet de joncs aux doigts multiples, exilé pour notre rire,
Même si tu es très loin, nous t’invoquons :

Viens ; assouplis notre peau brute d’antilope…

Tonnerre de tanks de pas de fer géants de détonateurs,
Reste en retrait de la clairière, nous t’implorons :

Nous sommes accordés pour une agape-de-sept-âmes…

Labyrinthes (1971), traduit de l’anglais par Christiane Fioupiou
© éditions Gallimard, 2020

Christopher Okigbo se méfiait des slogans de la négritude. Son unique recueil, Labyrinthes, est l’héritier des recherches formelles de T.S. Eliot, comme des cultes traditionnels igbos. Jeune officier volontaire victime de la guerre du Biafra, il donnait ici la parole aux tambours longs, qui sont les esprits des ancêtres, les morts. 

 

 

 

 

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