Pour des raisons diverses, un quartier populaire attire des artistes, des architectes, des ménages plus aisés… Et il se transforme progressivement. Des commerces à la mode se créent, le prix du mètre carré augmente, en même temps que les loyers. Ne pouvant suivre, les habitants les plus modestes sont amenés à s’exiler en de lointaines banlieues, libérant des logements qu’acquièrent de nouveaux arrivants. Bref, se met en place un processus d’embourgeoisement que l’on constate dans toutes les grandes villes et que les spécialistes qualifient désormais de « gentrification ».

Ce terme un peu barbare est issu de l’anglais gentry qui désigne la noblesse non titrée. Lequel mot serait, nous dit-on, une altération de l’ancien français genterie, lui-même dérivé de gentil.

Le phénomène est en effet d’une grande gentillesse, du moins au début. L’arrivée de bobos dans un quartier populaire crée de la mixité sociale et une sorte de paisible melting-pot. On dirait que « toutes les races enfin s’embrassent », comme le chantait Guy Béart. Jusqu’au moment où les nouveaux venus, en nombre croissant, s’approprient entièrement la zone et y impriment leur marque. Ordre, calme et volupté. Même les écoles s’améliorent. Ne subsiste plus de l’ancien quartier, « rénové », « réhabilité », « revalorisé », que les logements sociaux.

Gentrifieurs et gentrifiés sont, les uns et les autres, des personnes déplacées. Des migrants, volontaires ou contraints. La gentrification est une voie à double sens qu’il vaut mieux emprunter dans le sens de la montée. 

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