« On a affaire à un phénomène générationnel au sens historique »
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En 2017, vous avez publié avec Serge Guérin La guerre des générations n’aura pas lieu. Cette affirmation est-elle toujours vraie, malgré le contexte de pandémie qui exacerbe les tensions sociales ?
Je le crois, oui. La guerre des générations est un scénario qui revient souvent, comme s’il nous permettait d’apprivoiser la complexité du réel – ce que promettent aussi à leur manière les récits complotistes. Comme si la lutte des classes, la guerre des sexes, des races ou des générations pouvaient tout expliquer, et donc tout résoudre. Or nous n’assistons à aucune bataille, les lieux de conflit n’existent pas et, au contraire, les signes de rapprochement intergénérationnel s’avèrent plus nombreux que les dérives. Il y a tant de mauvaises nouvelles en France qu’il est dommage de ne pas voir que les générations convergent de plus en plus.
Sur quel plan ?
Elles convergent tant en matière d’entraide que sur le plan des valeurs, qui sont de plus en plus partagées : tous aspirent à avoir un travail épanouissant, une famille d’individus où l’affection prime sur le devoir, et une spiritualité qui ne tombe pas du ciel mais suit un chemin personnel. Ce sont des valeurs plus individualisées que par le passé, mais que toutes les générations ont désormais largement en commun.
Pourquoi alors entretient-on si souvent cette idée de guerre des générations, et avec quels effets ?
Le seul risque véritable, c’est que les politiques prennent cette idée au sérieux et s’engagent dans une politique de Robin des Bois, qui enlèverait aux supposés favorisés pour donner aux prétendus maltraités. En réalité, chaque génération a de bonnes raisons de se croire victime de toutes les autres : les personnes âgées sont furieuses de vivre dans une époque où la vieillesse est ennemie ; les jeunes sont en colère de rencontrer autant d’obstacles dans l’accès à l’autonomie, à travers l’emploi ou le logement ; et les actifs peuvent se sentir écrasés par le double financement des études des jeunes et des retraites des vieux, alors qu’ils sont de moins en moins nombreux. Si on prenait cette analyse au sérieux, ce n’est pas une, mais de nombreuses guerres auxquelles nous devrions assister. Or on ne voit pas cela. Ce qu’on constate, c’est que les vieux se préoccupent généralement des j
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