On vivait une époque où les hommes de plus de quarante ans y réfléchissaient à deux fois avant d’aller se promener en plein milieu de la nuit. Après quarante ans on est vieux. Et les nouvelles générations éprouvaient un total mépris pour les vieux. Un sombre ressentiment dressait les petits-fils contre les grands-pères, les fils contre les pères. Et ce n’est pas tout : il s’était créé des espèces de clubs, d’associations, de sectes, dominés par une haine sauvage envers les vieilles générations, comme si celles-ci étaient responsables de leur mécontentement, de leur mélancolie, de leurs désillusions, de leur malheur qui sont le propre de la jeunesse depuis que le monde est monde. Et la nuit, des bandes de jeunes se déchaînaient, surtout en banlieue, et pourchassaient les vieux. Quand ils parvenaient à en attraper un ils le bourraient de coups de pied, ils lui arrachaient ses vêtements, le fouettaient, le peinturluraient de vernis et puis l’abandonnaient ligoté à un arbre ou à un réverbère. Dans certains cas, tout à la frénésie de leur rite brutal, ils dépassaient la mesure. Et à l’aube, on trouvait au milieu de la rue des cadavres méconnaissables et souillés.

Le problème des jeunes ! Cet éternel tourment, qui depuis des millénaires s’était résolu sans drame de père en fils, explosait finalement. Les journaux, la radio, la télévision, l

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