Il faut se méfier, quand on interroge son entourage sur le sujet : les échanges sont vifs et les arguments presque sans fin pour justifier l’imposition, ou non, du service civique.

Comptons les points de ceux qui sont pour. Parmi eux, on affirme qu’un devoir civique non obligatoire n’a aucun sens : « la citoyenneté est un choix global, pas à la carte », clame l’un ; « après tout l’école est obligatoire, payer ses impôts aussi », renchérit un autre, appuyé par ceux pour qui seule cette imposition permet de garantir une réelle mixité sociale.

Ce principe d’obligation acquis, le débat se focalise ensuite sur les modalités de mise en œuvre : « obligatoire ne veut pas dire sacerdoce ou contrainte. Si on laisse le choix du sens à donner à l’action, c’est justement là qu’elle devient utile et positive ! » insiste-t-on d’une part. « L’important ici est surtout le contenu. » Offrir une large palette de choix de missions (en France comme à l’étranger) et rémunérer cet engagement (au moins au Smic) font partie des conditions de mise en œuvre. L’idée est donc de repartir de la notion d’intérêt général et d’insister sur la finalité (autonomie individuelle, participation au bien commun, engagement écologique et social), tout en interrogeant plus largement l’utilité sociale de nos activités.

Quand vient la question du public concerné, certains partisans souhaitent que cette mesure ne s’applique pas qu’aux jeunes et plaident pour une mise à disposition de quelques mois à une année de sa vie au service de la solidarité. D’autres, conscients de la complexité du dispositif, imaginent même un « passeport de vie pour bâtir du collectif », utilisable plusieurs fois à différents moments de la vie de manière à assurer aussi un brassage intergénérationnel. Une sorte de pause ou de retraite obligatoire à différents âges de la vie.

Mais voyons maintenant les arguments du camp adverse. Outre le rejet du principe d’obligation, ils souhaitent préserver la notion d’engagement. « Comment peut-on encore parler de volontariat sous la contrainte ! » protestent certains. « L’incitation est plus porteuse que l’obligation », plaident les autres. Pire, « si c’est obligatoire, le service civique ne sera plus un motif de fierté pour les jeunes qui le font, et les associations risquent de devoir gérer des jeunes peu motivés », souligne-t-on encore. Sans oublier le risque de voir le service civique dériver vers de l’emploi déguisé, voire forcé, en proposant « une nouvelle forme de main-d’œuvre très, très bon marché », en générant une nouvelle catégorie de travailleurs pauvres.

Ici, on insiste aussi sur le risque d’imposer un dispositif à des jeunes qui n’ont pas envie de s’y impliquer. Prendre ce temps doit être un choix, une question de conviction. Faut-il l’imposer aux seniors pour autant ? « Ce serait oublier que les retraités sont déjà très engagés dans la vie associative, qu’ils ne sont pas égaux face à la santé, et qu’ils sont aussi souvent sollicités par leurs petits-enfants ! » s’insurge-t-on.

L’argument massue, à ce niveau, arrive quand on se penche sur les conditions financières de mise en œuvre. Instaurer un service civique obligatoire d’une durée allant de 6 à 8 mois coûterait entre 5 à 8 milliards d’euros – une somme aujourd’hui difficile à dégager. L’imposer reviendrait donc à instaurer 800 000 services civiques de courte durée, ce qui n’irait pas dans le sens d’une étape éducatrice suffisamment longue pour être efficace. L’argent dépensé ainsi ne permettrait pas à la mesure d’atteindre son potentiel transformateur, d’autant qu’il faudrait, au préalable, monter en puissance sur le nombre de missions réalisables.

Bref, une chose est sûre : sur ce sujet, rien que le débat permet de donner de sa personne… 

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