Parce que le destin d’un homme ou d’une femme n’est pas de terminer sa vie seul. Parce que personne n’a vocation à passer vingt, trente, quarante ans de sa vie dans une maison de retraite, aussi agréable soit-elle. Parce que tout le monde n’a pas les moyens d’y consacrer de 3 000 à 5 000 euros par mois. Parce que la vieillesse ne peut être regardée sous le seul angle de la dépendance et d’un risque, le cinquième, celui qui pèsera le plus financièrement sur les épaules d’une société de chômage et de précarité. Parce qu’on ne peut plus laisser les aidants familiaux désespérer face à la lente dégradation mentale de leurs parents et grands-parents. Parce qu’une société qui exclut ses anciens ne mérite pas d’avoir un avenir. Parce qu’il est insupportable que 15 000 « vieux » soient tombés durant l’été 2003, autant sous l’effet de la canicule que de l’indifférence de leurs voisins. Parce que les jeunes ont besoin de la mémoire et de l’expérience de leurs aînés.

Pour toutes ces raisons, un club de réflexion, Allons enfants, qui avait vocation à se préoccuper de l’avenir des jeunes Français, a fait du vieillissement un enjeu de sa réflexion.

Objectif : imposer « le fait social le plus important de la seconde moitié du xxe siècle » (Alfred Sauvy) au cœur du débat public avec la volonté d’en faire une question de civilisation. Cette révolution de l’âge n’appelle pas une simple réforme technique mais un bouleversement de notre organisation sociale. 

En 2050, un tiers de la population aura plus de 60 ans. Le tabou ne peut plus durer. Le sujet angoisse les familles et fait peur aux pouvoirs publics, qui en ont fait une bombe à retardement financière en voie d’explosion. Mais ils ne font rien ou si peu, laissant familles, associations et municipalités gérer avec leurs faibles moyens. 

C’est une réponse civilisationnelle qu’il faut. Il faut re-considérer nos personnes âgées comme des citoyens engagés dans la société. 

Un service civique senior obligatoire est à même d’y répondre. Et évitons les caricatures stupides : il ne s’agit pas d’empêcher les retraités de profiter de leur liberté après une vie de labeur, ni de remettre les anciens au travail !

Parce que la retraite n’est pas la fin de la vie, mais le début d’une autre, susceptible de durer encore trente ou quarante ans, consacrer, contre indemnité, une à quelques heures par semaine à des missions éducatives, culturelles, sportives ou solidaires pendant 3 à 6 mois bouleverserait positivement notre organisation sociale. Pour un retraité au faible pouvoir d’achat, ce serait l’occasion de gagner 233 euros pour 1 heure par semaine (24 heures maximum) pendant 3 mois (6 mois maximum), consacrée aux autres. Pour ceux qui ne le souhaitent pas, pas de prison, comme cela fut dit, mais une retenue de 5 % sur la pension de retraite annuelle (qui manifestement ne les empêchera pas de profiter de leur liberté), une somme qui ira abonder un fonds de financement du service civique senior. Évidemment, les seniors qui n’auraient pas ou plus la capacité physique d’accomplir une telle mission en seraient exemptés.

Une telle mesure présenterait plusieurs avantages : augmenter le pouvoir d’achat des retraités dans le besoin ; permettre aux enfants du baby boom, aux pensions de retraite substantielles, de rendre un peu de ce que la société leur a donné ; favoriser la transmission des savoirs et des expériences, notamment vers les plus jeunes ; et maintenir l’autonomie des retraités le plus longtemps possible face à la fulgurance des maladies dégénératives qui isolent. 

On le voit le service civique senior profiterait tant aux retraités eux-mêmes qu’à l’ensemble de la société. 

Voilà à quoi tient un bouleversement sociétal : le retour de l’engagement. Le service civique senior redonnerait tout simplement du sens à notre société.  

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