Un an après son élection aussi triomphale qu’imprévisible, Emmanuel Macron règne autant qu’il préside, monarque républicain – monarque et en même temps républicain –, sensible aux ors de la République quand elle se donne des airs de monarchie, de Versailles à Chambord en passant par la nécropole de Saint-Denis où le président ne dédaigne pas de s’attarder pour un colloque intime avec les rois de France. Parmi les François, il ne reconnaît guère Mitterrand, et Hollande encore moins. Comme premier des Français, son François s’appelle François Ier. Il y a de la Renaissance dans le macronisme, l’élan d’un nouveau départ initié par lui et son incroyable victoire sur le monde (politique) ancien, ce que le philosophe communiste Alain Badiou a appelé « un coup d’État démocratique ». Élu et bien élu quoi qu’en disent ses opposants, Emmanuel Macron s’est coulé dans un moule qu’on croyait brisé par ses deux – ou trois – prédécesseurs : celui d’un chef d’État jouant pleinement son rôle de chef, au point parfois de le surjouer, comme lors du limogeage avec perte et fracas du général de Villiers au début de son mandat. La France a un président. Les Français l’ont vu à l’œuvre. Les étrangers aussi, en Europe comme aux États-Unis, où il a interprété en version tricolore le rôle d’un Kennedy jeune et jovial. Sans pour autant obtenir de son « ami » Donald la moindre inflexion dans sa politique internationale. C’est là un premier accroc dans la mécanique macronienne : le sourire Gibbs et les tapes dans le dos ne font pas une diplomatie. L’assurance du président français, sous-tendue par cette impression qu’il donne de ne douter de rien, se heurte parfois au mur du réel.

La confiance en soi est une qualité. Elle se justifie chez Emmanuel Macron. Il garde après une année d’exercice du pouvoir un fort soutien des électeurs. Ses supporteurs de La République en marche restent massivement soudés derrière lui. Une part de la gauche traditionnelle lui garde aussi sa confiance, et même une partie des Républicains ! Il est fondé à se sentir droit dans ses bottes, comme pourrait dire son Premier ministre juppéiste. D’où vient alors la paille dans l’acier macronien, cette soufflure, ou boursouflure, qui gêne aux entournures ? Au-delà des critiques émises – un « président des riches », voire des « très riches », qui promeut la « fléxi » sans sécurité dans l’univers du travail –, on voit se reconstituer d’anciennes déchirures du tissu social. Ce n’est plus la gauche et la droite, certes. Mais un clivage de classes inquiétant entre cadres et ouvriers, comme l’écrit Jérôme Fourquet dans ce numéro. Et la sensation qu’en l’absence d’une opposition digne de ce nom, l’autorité du président pourrait se changer en un exercice solitaire, sinon autoritaire du pouvoir. Nous n’en sommes pas là. Mais, on le sait des plus grands arbres, c’est du côté où ils penchent qu’ils finissent par tomber. 

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