Par-delà le noir
Publié en 1981 dans la jeune revue Le Débat créée un an auparavant par Pierre Nora, ce texte polémique du célèbre anthropologue ne manqua pas de faire du bruit : le pionnier du structuralisme, alors à la pointe de la pensée contemporaine, s’y affirmait partisan d’une théorie esthétique résolument antimoderniste. Collectionneur et esthète, celui qui étrillait déjà en 1966 la peinture de Picasso dénonçait maintenant l’art moderne, piégé dans l’impasse du discours sur lui-même, et lançait ainsi une véritable dispute à laquelle prirent part l’artiste Pol Bury, l’historien d’art Pierre Daix ou encore le philosophe Jacques Ellul. Premier à lui répondre, Pierre Soulages : à quelques numéros d’intervalle, le peintre, alors dans la force de l’âge et dont l’ascension se poursuivait, livrait une réplique ferme. Nous reproduisons ici de larges extraits de cet échange.Temps de lecture : 8 minutes
Le métier perdu
Claude Lévi-Strauss
Pour faire un peintre, il faut beaucoup de science et beaucoup de fraîcheur. Les impressionnistes avaient encore appris à peindre, mais ils faisaient ce qu’ils pouvaient pour l’oublier ; sans y parvenir, Dieu merci, mais en réussissant à persuader une nuée d’épigones que le savoir était inutile, qu’il suffisait de lâcher la bride à la spontanéité et, selon une formule qui eut une célébrité désastreuse, de « peindre comme l’oiseau chante ». Qu’en dépit des œuvres merveilleuses qu’il a produites, l’impressionnisme conduisait à une impasse, la brièveté de sa première phase l’atteste, ainsi que la réforme à quoi se dépensèrent Gauguin et Seurat. Mais s’ils furent, eux aussi, des grands peintres (surtout Seurat), l’impressionnisme tout proche avait encore sur eux trop d’ascendant pour que l’idée simple leur vînt de chercher la solution dans un humble retour aux servitudes du métier. Ils visèrent donc tous deux loin de la cible : en deçà de la peinture pour Seurat, et pour Gauguin au-delà . Ni les théories physiques aujourd’hui dépassées où Seurat voulut enraciner son art, ni le mysticisme confus auquel Gauguin tenta d’accrocher le sien ne pouvaient aider durablement une peinture désorientée à retrouver sa voie.
Tout cela était-il inévitable ? […]
L’impressionnisme a démissionné trop vite en acceptant que la peinture eût pour seule ambition de saisir ce que des théoriciens de l’époque ont appelé la physionomie des choses, c’est-à -dire leur considération subjective, par opposition à une considération objective qui vise à appréhender leur nature. On considère subjectivement des meules de foin, quand on s’applique à rendre dans une série de toiles les impressions momentanées quelles provoquent sur l’œil du peintre à telle ou telle heure du jour et sous tel ou tel éclairage ; mais on renonce du même coup à faire saisir intuitivement au spectateur ce qu’est, en soi, une meule. Les peintres antérieurs sâ€


« Cette peinture contient le monde entier »
Alfred Pacquement
Son œuvre est d’une remarquable cohérence, mais on peut incontestablement y déceler des « phases ». La principale rupture se situe en 1979, lorsque commence cette période qu’il a appelée Outrenoir. On peut constater aujourd’hui qu’elle se poursuit.
La morsure de l’acide
Lou Héliot
Même si elle n’en constitue qu’une partie infime, la gravure illumine toute l’œuvre de Soulages. Passion cyclique et creuset d’expérimentation, l’ensemble de ses eaux-fortes, qui sont toutes c…
« Il crée des stèles arc-en-ciel »
Fabienne Verdier
Pierre Soulages a inventé ses outils de peintre. Vous aussi. A-t-il ouvert la voie ?
Il m’a enseigné cela. Il a eu l’audace de quitter les pinceaux traditionnels du peintre et de réinventer l’acte de peindre avec de nouveaux outils. Il s’est intéressé aux outils d’autres tec…