Le jeudi 21 février 1963, Annie Ernaux écrit à une amie : « Tu sais, je ne crois pas que je serai éditée mais je veux envoyer mon roman parce que… Parce que c’est le goût du risque. » Près de soixante ans après, elle obtient la plus haute distinction littéraire : le prix Nobel de littérature. En 1985, dans son journal cette fois, elle note : « Je ne peux qu’écrire dangereusement, vraiment dangereusement » – la stabilité et la longévité d’une carrière littéraire se cristallisent toujours dans cet élan frondeur, rageur, cette forme de nécessité impérieuse qui n’est pas sans violence et nous rappelle, comme l’écrivait Mario Vargas Llosa, que « la littérature nous dédommage des revers que nous inflige la vie véritable ». Tout part de là, chez tout écrivain ; les revers, les frustrations, les humiliations : des combustibles pour la littérature. Annie Ernaux, plus que tout autre, a su décrire cette expérience du déclassement, le sentiment de ne jamais être à sa pla

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