« Premier parti de France », clame la page Facebook officielle du Front national. Et de fait, avec plus de 190 000 like, ce parti fait beaucoup mieux que le PS (92 000) et l’UMP (98 000). Si les élections se jouaient sur les réseaux sociaux, le slogan deviendrait réalité. Ces chiffres montrent combien la stratégie de dédiabolisation voulue par Marine Le Pen a porté ses fruits : l’étiquette « Front national » n’est plus aussi infamante qu’elle l’a été, et on peut bien liker son actualité sans mettre en danger son image sociale.

Cette donnée, relativement nouvelle, risque de perturber le travail des sondeurs, en invalidant le « redressement politique » qu’ils appliquent traditionnellement à leurs enquêtes. Cette opération est née du constat empirique qu’une abstention, un vote de droite et -encore plus d’extrême droite sont plus difficiles à déclarer et à assumer socialement qu’un vote socialiste ou écologiste, en particulier quand il faut répondre à un enquêteur en face à face. Les instituts de sondage ont donc développé des techniques pour compenser cette sous-déclaration systématique. Une méthode consiste par exemple à demander dans la foulée aux sondés pour qui ils ont voté lors de la dernière élection comparable. Et si 5 % expliquent avoir voté FN, alors que le score du parti à cette élection a été de 10 %, l’institut s’autorise à doubler le résultat du FN dans son sondage. Pour affiner ce redressement, certains instituts y associent d’autres questions (la proximité avec les partis, la position sur certains grands sujets, la certitude d’aller voter, l’assurance du choix…), qui permettent de typer un comportement électoral au-delà de celui seul déclaré par le répondant.

Maintenant que le vote FN n’est plus quelque chose que l’on cache, ces redressements n’ont plus lieu d’être et gonflent artificiellement les scores. Les instituts de sondage, dans le secret de leurs laboratoires, ont probablement réagi à cette nouvelle donne, sans que l’on sache quand et comment. 

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