NAPOLÉON, qui les employait volontiers, avait pour eux un impérial mépris. « On récompense les espions avec de l’or, pas avec des médailles », disait-il. Ces personnages de l’ombre ont longtemps été assimilés à de basses œuvres : cabinets noirs, polices politiques, fonds secrets, interception du courrier, assassinats déguisés… Quant au contre-espionnage, censé espionner les espions, il a démontré, avec l’affaire Dreyfus, jusqu’à quelle abjection il pouvait conduire.

Si les espions étaient mal vus, que dire alors des espionnes ? La plus célèbre d’entre elles, Mata Hari, dont le pseudonyme oriental est devenu un nom commun, n’a pas contribué à ennoblir le métier. Manipulée par les services secrets de trois pays différents, cette danseuse érotique en mal d’argent a fini par être fusillée en octobre 1917, officiellement pour intelligence avec l’ennemi, mais en réalité pour défendre le moral des poilus.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, nombre de résistantes ont fourni de précieuses informations aux alliés, et l’ont payé parfois de leur vie. Leur héroïsme n’a pas suffi à changer l’image qu’on se faisait des femmes : leur rôle, dans le renseignement, ne pouvait être que d’extorquer des secrets sur l’oreiller. En bikini ou en nuisette, les James Bond girls ont des formes à damner tous les saints du calendrier…

Aujourd’hui, la DGSE emploie un tiers de femmes, qui n’occupent pas que des postes subalternes. Barbouzes et plombiers cèdent la place aux cryptanalystes, interprètes d’images satellitaires, linguistes d’écoute et dix autres sortes de cybercombattant·e·s unisexes. Nous n’avons plus d’espions, au masculin ou au féminin, mais des agents de renseignement et leurs officiers traitants. L’espion, c’est l’ennemi. 

Vous avez aimé ? Partagez-le !