À l’échelle d’une vie, cela peut sembler encore lointain. Du point de vue climatique, c’est déjà demain. Pour ce numéro anniversaire, le 1 vous propose un saut dans le temps, pour imaginer la France de 2050. Ce choix de date n’est pas innocent : à cet horizon, les grandes tendances sont déjà écrites. Le climat est une machine lourde, ­complexe, avec une inertie de plusieurs décennies. Le portrait du pays présenté dans ce numéro ne formule donc pas des hypothèses, qui seraient encore soumises aux choix à venir, mais des certitudes scientifiques auxquelles nous ne pouvons plus échapper. Celles-ci dessinent un paysage bouleversé, marqué par la multiplication d’épisodes climatiques extrêmes : sécheresses dans le Périgord, incendies en Sologne, inondations dans le Marais poitevin, orages violents dans l’arc méditerranéen… Aucun territoire ne sera épargné par ce coup de chaud, qui devrait modifier les équilibres régionaux : adieu le ski dans les Pyrénées et les étés sur la Côte d’Azur, vive la douceur bretonne et les vignes normandes ! Le premier des défis à relever sera ainsi celui de l’adaptation à ces nouvelles conditions, dans un pays vieillissant, qui devrait compter 8 millions d’habitants supplémentaires, essentiellement séniors.

Mais l’enjeu principal concerne les décennies suivantes. Car si l’histoire de la seconde moitié du siècle reste encore à écrire, c’est aujourd’hui qu’elle commence à se noircir. N’en déplaise aux derniers climatosceptiques, le réchauffement s’accélère avec la croissance des émissions de gaz à effet de serre et la plupart des États ont déjà pris du retard par rapport aux objectifs de l’accord de Paris, signé en 2015. Or, si rien ne change, ce n’est pas un, mais trois à quatre degrés supplémentaires que la France pourrait connaître avant la fin du siècle. Il ne serait plus alors question pour nos petits-­enfants de s’adapter, mais de survivre, sur un territoire devenu aride et inhospitalier. Ce scénario du pire n’est pas inéluctable. Mais il impose à nos générations de presser la transition vers la neutralité carbone : fin des énergies fossiles, rénovation massive des habitats, diminution des trajets en avion, sobriété de la consommation, réduction de la viande dans nos assiettes, voire baisse du nombre d’enfants. Reste à savoir si nous sommes prêts à de telles (r)évolutions ? Le manque d’ambition de la loi Climat et résilience, qui a largement édulcoré les 150 propositions faites par la Convention citoyenne pour le climat, est de ce point de vue un signal des plus inquiétants. Et la tiédeur de nos actions présentes, la promesse d’un avenir brûlant. 

 

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