Vous les damnés de la terre dans la brouillasse, le brouillard,
Vous les phoques trahis, toi le buisson maltraité. 

Humides prairies, rabaissées, surchargées,
Vous les chênes gris, au fait de tout,
Et vous les prés, avec vos intérêts de sauvages.

L’antique savoir des minerais
Qui s’étaient alliés aux strates sans nombre,
Les îles, heureux argument, 
Et la mer enragée qui se lave
Tout cet élément incertain
Qui bascule, comme cyniquement nous disons. 

Quelle adhésion de paysages décidés
Et vous jeunes fleuves déjà corrompus
Quel nouveau groupe parlementaire vous faites,
Qui va animer les débats. 

Les couchers de soleil sans sourciller montent au ciel
Avec leurs affiches, l’air remplit
De suppliante joie nos poumons.

Vous, mes compagnons de lutte, ces déserts en marche,
Comme ils changent nos fiers projets
Avec leur stratégie du désespoir
Et nous encouragent de leurs trombes d’eau.

Et l’homme englouti, ému de voir les
Raisonnables baleines,
Se soulève, rejoignant ses semblables, les minuscules
Racines.

Et notre Ligue, pourrie de part en part, si longtemps avilie
Par la solitude sur terre
Ressent
                le désir élémentaire. 

 

 Traduit par Jean-Paul Barbe,extrait de Poèmes choisis
© Éditions Gallimard, 2018

 

Volker Braun grandit dans Dresde en ruine. Il choisit de ne pas quitter la RDA, et la Stasi qui le surveille l’appelle M. Patrimoine. Très tôt conscient de la catastrophe écologique, il se demande dans « Après le massacre des illusions » : « Combien de temps la Terre va-t-elle nous supporter / Et que nommerons-nous liberté ? » 

 

 

 

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