À peine nommé commandant en chef de l’armée chilienne en 1973, Augusto Pinochet renversait le président Allende et s’emparait du pouvoir. Ce général aux dents longues complotait, paraît-il, depuis plusieurs semaines sous le nom de code de… Pinocchio. Trop beau pour être vrai ? En tout cas, les opposants ont baptisé ainsi le dictateur qui leur apparaissait comme une marionnette entre les mains des États-Unis. « C’est Pinocchio, Pino, Pinochet / Un bon gars, comme vous le voyez / Bien dressé, bien soumis / Il parle espagnol, mais il pense en anglais », chantait le compositeur nicaraguayen Carlos Mejía Godoy.

Le pinochétisme, en somme, était un humanisme…

La junte chilienne s’est distinguée par des meurtres, des viols et d’abominables tortures. Une « terreur aveugle », comme on dit, qui semblait être symbolisée par les lunettes noires que chaussait en permanence le général moustachu. Pinochet s’est fait cependant nommer président de la République, a endossé le costume civil, a abandonné ses lunettes noires et adopté un langage doucereux : « J’ai toujours été une bonne personne. Je salue les dames, je fais des caresses aux enfants, j’aide les pauvres. En fait, je suis un démocrate à ma manière », affirmait-il. Le pinochétisme, en somme, était un humanisme…

La fin de la dictature n’a pas conduit le dictateur en prison. On s’est aperçu pourtant que le « bon gars » qui prétendait assainir le Chili avait illégalement amassé une fortune pendant ses seize années de règne. Bref, un menteur, dont le nez aurait dû s’allonger à chaque menterie, comme celui du pantin de bois fabriqué par le menuisier Geppetto. Mais le héros du conte devient un bon petit garçon après s’être fait avaler par la baleine. Pinochet, lui, n’aura été qu’un requin. 

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