Al Mutanabbi - Je languis
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Je languis sur ma couche alors que mes deux flancs
Ne languissaient pour elle aucune heure de l’an.
Les envieux sont légion ; aussi rare est ma quête,
Peu me rendent visite et mon âme est défaite.
Forcé de s’aliter, mon corps est mal en point,
Ce corps soûlé de coups sans avoir bu de vin.
Ma visiteuse enfin, qu’on croirait inhibée,
Ne daigne me trouver que tard, la nuit tombée.
J’ai ménagé pour elle une soie rembourrée.
Fi donc ! C’est dans mes os qu’elle vint se fourrer.
Comme moi, se sent-elle à l’étroit dans ma peau.
Pour l’élargir en recourant à mille maux ?
Le matin, elle fuit, comme chassée par l’aube,
Tout en pleurs elle fuse et, preste, se dérobe.
Je l’attends sans désir, je guette sa venue
Inquiet comme un amant que l’amour exténue.
Mais lorsqu’elle revient, loyale, ponctuelle,
C’est une âcre agonie qu’elle apporte avec elle.
Quand la fidélité est cause de détresse,
C’est un sinistre bien que tenir sa promesse.
Ah, fille du malheur ! J’ai tous les maux en moi
Comment, par quel réduit as-tu frayé ta voie ?
Tu meurtris un blessé, un corps si accablé
Que nulle arme, pas même une pointe d’épée,
Ne saurait découvrir un lieu libre où frapper.
Se peut-il que mes mains se mettent à trembler
Quand il faudra tenir les rênes et la bride ?
Ah ! chasser l’idéal sur des bêtes rapides
Qui jettent sur leurs mors une écume perlée !
Ors et saisons, traduit par Patrick Mégarbané et Hoa Hoï Vuong © Sindbad / Actes Sud, 2006
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