Un labyrinthe et des robots
Cette journaliste américaine a passé de nombreux mois à sillonner les États-Unis dans un van pour mieux saisir la vie et le quotidien des précaires itinérants – un phénomène en plein essor depuis la crise des subprimes. Elle a tiré de cette immersion le livre Nomadland (rééd. J’ai lu, 2020), dont l’adaptation cinématographique réalisée par Chloé Zhao, en salle le 9 juin, a obtenu de nombreux prix, dont l’Oscar du meilleur film et celui de la meilleure réalisation. Elle décrit dans cet extrait sa découverte des entrepôts d’Amazon, entreprise qui recourt largement à cette main-d’œuvre, en particulier à travers son programme CamperForce.Temps de lecture : 7 minutes
Ma formation commence un mercredi matin : trente et une personnes sont réunies dans une salle de classe sur le site logistique d’Amazon. « Vous allez effectuer un travail très physique, nous prévient notre instructrice. Vous allez sans doute vous agenouiller mille fois par jour, et je n’exagère pas. Fessiers en acier, nous voilà ! Compris ? »
Le boulot n’est pas très compliqué en soi : il s’agit de scanner la marchandise pour vérifier l’état de l’inventaire. Mais nous découvrirons très vite que notre entrepôt (le plus grand de tout le réseau Amazon, d’après notre formatrice, et comparable en taille à plus de dix-neuf stades de football réunis) est un véritable labyrinthe. Plus de trente-trois kilomètres de tapis roulants acheminent des paquets à travers le site. Ils font un fracas de train de marchandises et s’enrayent pour un rien. On nous recommande d’attacher nos cheveux et d’éviter les pulls noués autour de la taille qui risqueraient de se faire happer par les rouleaux des convoyeurs. Nos badges sont suspendus à des cordons rétractables afin d’empêcher tout risque de strangulation. Une sirène vagit non-stop par-dessus le vacarme ambiant. Quand je demande des explications à un collègue, il m’explique qu’une alarme vient d’être réparée mais qu’elle semble à nouveau bloquée.
Durant notre formation, nous apprenons également que notre usine est l’un des dix centres de distribution Amazon où est testée l’utilisation de robots « sherpas ». Ces engins orange pèsent plus de cent vingt kilos et ressemblent à des aspirateurs automatiques géants. Techniquement, ce sont des « unités motrices » mais, pour la plupart des employés, ce sont simpl
« Aucune autre compagnie au monde n’est aujourd’hui aussi dominante »
Alec MacGillis
« Amazon n’est pas seul responsable, mais sa croissance a accompagné un mouvement de relégation des villes secondaires, vidées de leurs magasins et de leurs emplois, et donc de leur vie sociale, tandis que les métropoles florissantes concentrent la richesse captée par le commerce en ligne, les m…
[Tourment]
Robert Solé
EN TANT que citoyen responsable, je pense qu’il faut boycotter Amazon. Cette multinationale tentaculaire tue le petit commerce, exploite ses salariés, utilise nos données personnelles et échappe à l’impôt alors qu’elle fait des profits colossaux.
Mais i…
L’asservissement est ailleurs
Aurélie Jean
Les clics, les livraisons express et autres « actions flash » rythment notre rapport paradoxal à Amazon. Malgré un site de commerce en ligne au design somme toute démodé et des suggestions relativement bancales, la tendance actuelle n’est en aucun cas à refréner ses achats sur l…