Vingt ans. Vingt ans déjà qu’un matin lumineux de fin d’été, dans le ciel bleu immaculé de New York, deux avions ont l’un après l’autre percuté les tours jumelles du World Trade Center, déclenchant la plus grande attaque terroriste jamais vue sur le sol américain et partout ailleurs. Même en regardant en boucle sur nos téléviseurs ces images irréelles d’un cauchemar au ralenti, il nous fallut du temps pour réaliser qu’on avait bien vu ce qu’on avait vu. L’Amérique était attaquée, et avec elle le monde occidental dans ses valeurs, dans ses modes de vie, dans ses certitudes aussi. Après la chute du mur de Berlin, le politiste Francis Fukuyama n’avait-il pas annoncé « la fin de l’histoire » ? Plus tard, en 1996, un autre politiste, Samuel Huntington, avait au contraire parlé de « choc des civilisations ». Il venait de survenir de façon sanglante avec les trois mille morts des tours jumelles.

Aussitôt mille questions surgirent : pourquoi pareille agression ? Comment avait-elle été possible ? Quelles failles dans le renseignement avaient pu permettre la réalisation d’un tel attentat ? Et surtout, et d’abord : qui avait commis cet irréparable ? La réponse ne tarda pas. Deux noms circulèrent sur toutes les lèvres : Al-Qaïda, Oussama Ben Laden. Quant au « pourquoi », une décennie après la première guerre du Golfe menée par George Bush père, il était à chercher dans ce que les « fous de Dieu » tenaient pour une insupportable arrogance de l’Amérique à l’endroit des pays musulmans. Dans la plupart d’entre eux, les attentats du 11-Septembre furent accueillis avec un sentiment mêlé de vengeance accomplie, de peur et parfois de joie. C’était une humiliation bienvenue, un retour de bâton justifié. Et on découvrit aussi – ce n’était que le début –, des islamistes prêts à tout, y compris à perdre la vie, pour imposer à un monde à leurs yeux décadent leur modèle mortifère. Des actes de terreur nourris par une haine aveugle « des croisés et des Juifs » et par la volonté d’éradiquer les bases militaires occidentales de territoires « sacrés ».

Dans ce premier volet de notre série, nous avons voulu présenter dans le détail les forces à l’œuvre avant le drame. Comme dans toute tragédie, les indices ne manquaient pas. Les préparatifs lointains, comme les camps d’entraînement ouverts par Ben Laden en Afghanistan à partir de 1996, contrepartie de son soutien aux talibans. La première attaque d’Al-Qaïda à New York, dès 1993, dans le parking d’une tour du World Trade Center (6 morts, 1 042 blessés). Les activités du futur commando dirigé par Mohammed Atta à Hambourg, fin 1998, sans que la police antiterroriste allemande y voie goutte… Côté américain, la montée en puissance des néoconservateurs obsédés par l’idée de renverser Saddam Hussein… Puis vint l’assassinat du commandant Massoud, le 9 septembre. La machine infernale était lancée, sans personne pour l’arrêter. 

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