Le spectre d’une dislocation de la Russie
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En 2013, le journaliste Oleg Kachine estimait que « la Russie était un empire non dissous », que les énormes différences entre « régions européennes, comme Kaliningrad ou Saint-Pétersbourg, et féodales, comme le Daghestan et l’Ingouchie », présageaient d’une dislocation future. La même année, son confrère Iouri Saprykine, fataliste, constatait lui aussi : « Peut-être la Russie est-elle promise au démantèlement. » Dmitri Olchansky allait encore plus loin : « La Russie se disloquera d’ici dix ou vingt ans. Le Caucase sera composé de quelques États agressifs où régneront la terreur et la religion. L’Extrême-Orient russe, la Sibérie deviendront des protectorats […] où le pouvoir théorique sera exercé par Moscou, mais où le pouvoir réel appartiendra à des conglomérats [étrangers] qui exploiteront le gaz et le pétrole. La Russie centrale retrouvera les frontières du xvie siècle et sera l’État national des Russes. » Ces trois journalistes ont participé à des marches, à des manifestations contre le pouvoir. Saprykine a même figuré, en février 2022, parmi ceux qui ont eu le courage de se prononcer publiquement contre l’invasion de l’Ukraine. Ils ont tous les trois eu maille à partir avec le Kremlin.
Mais ils ne sont pas les seuls, tant s’en faut, à jouer les Cassandre. Oleg Smoline, député du Parti communiste : « Je n’exclus pas [...] que nous perdions encore une partie de la Russie. [Le système actuel] entraînera une nouvelle catastrophe. » Oksana Dmitrieva, députée du Parti de la croissance (une des composantes de la coalition Front populaire panrusse, qui soutient Vladimir Poutine) : « Les prochaines années détermineront si la Russie peut faire un bond économique et social, conserver sa population et son territoire, ou si elle va [...] devenir un appendice à matières premières et perdre une partie importante, active et instruite de sa population. » [Les extraits cités proviennent d’interviews publiées dans Il est des Russes (éditions du Courrier de Russie, 2013)]
[Ma guerre]
Robert Solé
Que de chemin parcouru en un an ! Je mesure maintenant l’ignorance qui était la mienne. Avant le déclenchement de la guerre en Ukraine, pouvais-je indiquer, même approximativement, la portée d’un missile sol-air Patriot ? Savais-je seulement la différence entre un char Leclerc et un char Leopard …