Nous devions tout de même finir par nous rencontrer, Saint-Exupéry et moi. D’abord, on me le désigna, dans une brasserie du boulevard Saint-Germain. Assis à cheval sur une chaise, dans un cercle d’admirateurs qui écoutaient Léon-Paul Fargue raconter des histoires imaginaires. Il écoutait comme les autres, mais il riait plus fort.

Une autre fois, je le surpris en train d’écrire dans un café et je l’observai. Il faisait des gestes avec sa main gauche, non pas comme s’il déclamait, mais comme s’il avait à chasser l’ombre importune d’un avion qui se promenait sur son papier.

Enfin, un ami commun me présenta à Saint-Exupéry et à sa femme, une charmante Sud-Américaine qui appelle son grand homme Tonio. Ce jour-là, je pus le voir sourire de près, comme on peut surprendre à l’écran dans un gros plan le sourire d’un héros auquel on s’est attaché – et ce sourire est infiniment doux et pathétique, comme toujours quand un homme d’action rêve. 

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