Je ne comprends pas l’idée de revenu universel. Je comprends qu’on dise : « Tous ces chômeurs et ces pauvres qui protestent, donnons-leur 750 euros par mois et qu’on en parle plus ! » et… enrichissons-nous tranquillement. Trump pourrait dire cela. J’entends aussi qu’on dise : « Donnons 750 euros à tous ces pauvres qui nous regardent. » Mère Teresa aurait pu dire cela. Ou qu’on dise : « La révolution collaborative va supprimer le travail, alors trouvons un autre revenu. » Mais qui le dit ? Où a-t-on jamais vu l’homme ne pas créer et inventer ? Non, ce projet est celui d’une défaite de la pensée. Il ne prolonge pas l’école pour tous, la pension de retraite, les allocations de chômage, ni la couverture maladie universelle. Non, il transpire la peur, la fin de l’homme inventif et créatif. Il a la grisaille du rond-de-cuir.

Aujourd’hui, 40 % des salariés s’occupent du corps des autres : éduquer, soigner, cultiver, divertir sont les grandes inventions du xxe siècle. Cet investissement gigantesque sur le corps a bouleversé l’équilibre de nos sociétés. Et nous avons su le financer ! La vie alors est plus longue, la productivité plus forte, l’art de vivre bien meilleur, l’érotisme considérable. La richesse a explosé alors même que nous travaillons moitié moins qu’il y a un siècle. 

Aujourd’hui, la nouvelle révolution technologique – numérique, collaborative et robotique – demande à nouveau un investissement massif sur les corps. Prise en charge de la toute petite enfance, études plus longues pour tous, formation continue tout au long de la vie et soin aux anciens sont devant nous les eldorados à découvrir pour recréer du lien social et orienter la production de richesse vers plus d’intelligence et d’écologie.

Contrairement à ce qu’essaient de nous vendre chaque jour les industriels, ce n’est pas l’objet mais le corps qui est au cœur de la richesse du monde moderne. La production des objets occupe moitié moins d’hommes que l’épanouissement des corps. Et, de plus en plus, nous aimons les objets réutilisés, d’occasion, partagés. Je me demande, quand je suis grognon, si le revenu universel n’est pas une idée issue d’une classe politique… qui n’a jamais travaillé. 

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