Pourquoi la question du revenu universel a-t-elle surgi dans le débat public ?

Cette notion a une tradition intellectuelle ancienne, très antérieure aux débats actuels sur les effets de la crise financière et de la numérisation sur l’emploi. Mais, indiscutablement, elle retrouve une actualité en réponse à ces crises. Nous sommes entrés dans une ère de précarité nouvelle pour le travail. Le chiffre des exclus de ce marché augmente d’un million tous les cinq ans. Aujourd’hui, cela représente près de 6 millions de personnes, auxquelles s’ajoutent 2 millions de grands pauvres. La nécessité de créer un nouveau socle de protection s’impose. 

Le revenu universel est directement lié au manque de travail ?

Ce qui est en jeu, c’est moins le manque absolu de travail que les formes dans lesquelles il s’inscrit. De plus en plus de personnes se retrouvent entre deux emplois, menacés d’ubérisation pour certains, sans employeur légitime... 

Le rôle de l’État providence en est-il modifié ?

Oui, car chez nous l’État providence est d’inspiration corporatiste, bismarckienne. Cela signifie que les droits accumulés sont hérités de la situation dans laquelle on se trouve : le droit au chômage est proportionné au salaire, comme le droit à la retraite ou au congé maternité. On a construit des dispositifs où les droits qu’on peut tirer sur la société dépendent de la situation sociale occupée auparavant. Un nouvel État providence pour la France serait de quitter ce corporatisme pour aller vers une formule de type scandinave où les prestations offertes, notamment en matière de santé, sont de nature universelle. Les dispositifs ne dépendent pas du statut de la personne. Depuis Rocard, qui s’inspirait des pays sociaux-démocrates,

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