La France a semblé, dans la campagne présidentielle qui s’achève, plus que jamais obsédée par son histoire, ce rétroviseur de sa puissance défunte. Les candidats à la magistrature suprême, avec la complicité d’intellectuels et d’essayistes, l’ont en permanence convoquée pour remettre de l’ordre dans un monde suintant de menaces. Jeanne d’Arc et Jean Jaurès, Lavisse et Michelet, de Gaulle et Mitterrand, la Révolution, l’Empire et la Commune ont, à longueur de discours, été appelés à la rescousse d’un présent difficile à saisir et d’un futur indéchiffrable.

Déjà en 2007 et 2012, la tentation d’instrumentaliser le récit national s’était manifestée de manière particulièrement marquée. Tout juste élu, Nicolas Sarkozy avait demandé à ce que soit lue en classe la lettre du jeune résistant communiste Guy Môquet, puis proposé que chaque élève de CM2 « parraine » un disparu de la Shoah, des initiatives heureusement avortées. La décision de François Hollande de rendre hommage à Jules Ferry, une semaine après son élection, avait également suscité des polémiques en raison de la politique coloniale que l’inventeur de l’école laïque et obligatoire avait incarnée à la fin du XIXe siècle.

Choc des histoires, hantise du déclin, fantasme de la restauration d’un récit national accepté par tous : comment en est-on arrivé là ? Comme pour de nombreuses obsessions françaises, à commencer par la question identitaire, les années 1970 et 1980 sont décisives pour comprendre la généalogie des usages politiques des controverses historiques. C’est à cette période que les grands mythes qui structuraient le récit national sont progressivement contestés, avant tout par les historiens eux-m&eci

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