Vivre presque sans plastique
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Ouvrez votre frigo, il est là. Dans votre poubelle ? Omniprésent. Autour de vos aliments, dans vos placards de cuisine, sur votre dos et même dans la composition de vos cosmétiques, il est partout. Loin d’être un visiteur affable et prévenant, le plastique se révèle discrètement nuisible, merveilleusement vicieux. Pollution des sols lors de l’extraction du pétrole, rejets dangereux pendant sa transformation, fragilité à l’usage, dégradation toxique en décharge ou en incinérateur, particules empoisonnées en mer… Ce fantastique matériau est à l’origine d’une pléthore d’impacts environnementaux, qui nous semblent bien insaisissables. Sommes-nous pour autant impuissants à leur égard ? Ces effets environnementaux dépendent bien de nos besoins en plastique, résultats eux-mêmes de nos choix quotidiens. Ils découlent donc de nos gestes de chaque jour. Un syllogisme simple, mais qui a provoqué chez moi, il y a quatre printemps de cela, une prise de conscience et marqué le début de mon odyssée (presque) sans plastique.
En une année, de nouvelles habitudes conscientes et responsables ont petit à petit remplacé mes anciens gestes irréfléchis et subtilement délétères. J’ai commencé à bouder les supermarchés au profit de magasins locaux. Les emballages à usage unique ont peu à peu déserté mes placards de cuisine. Les bocaux en verre garnis de denrées achetées en vrac y ont emménagé, aux côtés de la vaisselle en bois, céramique et inox. Le vinaigre blanc ne fut pas en reste, fièrement transmué en produit ménager antibactérien et anticalcaire pour tout le logis. Le citron, l’huile biologique de noisette, le marc de café et le bicarbonate de soude de la cuisine ont été promus dans la salle de bains aux postes, respectivement, de masque de visage, d’hydratant de peau, d’exfoliant ou encore de déodorant. J’ai troqué mes objets jetables pour des sacs de courses en tissu, un rasoir en inox, des sachets en tissu imperméable, ou une gourde en acier inoxydable. Pour des habitudes durablement ancrées dans un quotidien, même chargé, il me fut essentiel de choisir des gestes à la fois simples et réalistes.
Paradoxalement, il ne s’est pas agi pour moi de faire la guerre au plastique. Vouloir vivre totalement sans plastique serait un combat vain et inefficace. L’utilisation de ce matériau est parfois inévitable (l’électroménager, les téléphones, les plaquettes de médicaments ou encore les emballages de certains aliments ne peuvent se faire sans). Le plastique représente même parfois une avancée majeure, par exemple en matière de sécurisation des appareils et installations électriques. Le Don Quichotte du plastique se lancerait dans une bataille perdue pour supprimer le plus dérisoire détail. Il s’agit essentiellement de refuser d’avoir constamment du plastique au bout des doigts tel un Midas des temps modernes. De tenter de réduire de 70, voire 80 % ses objets et déchets en plastique. Sans pression, ni sacrifices. Je continue ainsi d’acheter certains aliments introuvables sans emballages plastique comme les nouilles ou les glaces. J’ai conservé les objets qu’il aurait été inutile de remplacer (mes stylos, boîtes de rangement ou vêtements en polyester). J’achète en bouteilles plastique recyclables le fameux vinaigre blanc, rarement en vente en vrac.
Quatre printemps après les balbutiements de ma transition, mes ordures ménagères en sont réduites au quasi-néant. Le plastique a presque disparu des étagères de mon réfrigérateur, de ma cuisine et de ma salle de bains. Mes aliments ne sont quasiment plus en contact prolongé et risqué avec des emballages pétrochimiques.
Au cours de ces tribulations (presque) zéro plastique, nombreuses ont été mes découvertes et mes surprises. Les effets délétères du plastique se sont révélés non seulement environnementaux mais également sanitaires. Tapi dans l’ombre de nos emballages ou même à l’intérieur de nos produits de beauté, l’insoupçonné plastique libère des solvants, dont une kyrielle s’avèrent toxiques à long terme. Au-delà des impacts environnementaux, réduire son usage de plastique au quotidien permet donc aussi – et peut-être surtout – de protéger sa propre santé. Je fus également bien stupéfaite de réaliser qu’écologie et économies sont à mille lieues d’être antinomiques. Adopter des ingrédients simples et sains de nos cuisines comme produits cosmétiques et ménagers, acheter d’occasion, investir dans des objets solides et réutilisables, bref, consommer moins mais mieux, m’a fait économiser 30 % de mes dépenses courantes. Un beau pied de nez à mon idée reçue sur la nécessité d’un revenu élevé pour adopter un quotidien écologique... Enfin, cette transition s’est avérée aussi pragmatique que philosophique et éthique. Mettre en lumière les grandes conséquences de mes petits automatismes et questionner l’innocuité des biens du quotidien m’a incitée à (re)prendre le contrôle de mes propres impacts, sur et autour de moi. Je choisis de manière consciente et informée les produits que je consomme. Bien loin de moi les crèmes hydratantes aux listes d’ingrédients interminables et sibyllins, je connais aujourd’hui ce que j’applique sur mon corps et ce avec quoi je le nourris. De ce réel gain de connaissance et d’autonomie dans ma consommation sont nées une satisfaction et une fierté personnelles incontestables. Par de petits gestes accessibles et profitables à tous – mais pas moins efficaces – je fais ma part, pour atténuer autant que possible les impacts néfastes que je laisse derrière moi.
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