Le Moyen-Orient s’étend sur plus de 7,5 millions de kilomètres carrés. Il compte quinze États et environ 420 millions d’habitants, dont 60 % dans les trois pays les plus peuplés de la région : l’Égypte (95 millions), l’Iran (80) et la Turquie (80). Avec un écart d’un à quinze entre la Jordanie et le Qatar, les niveaux de vie sont parmi les plus contrastés du monde, en raison de la distribution inégale des gisements de gaz et de pétrole – les plus abondants de la planète et les moins chers à exploiter. Les États-Unis y ont des bases militaires terrestres et navales importantes (Al-Udeid, au Qatar, et Bahreïn), de même que la France (Abu Dhabi) et la Russie (Hmeimim et Tartous en Syrie). Outre certains clientélismes, les budgets publics et privés surabondants alimentent des stratégies d’influence et d’ingérence, comme on a pu l’observer en Syrie, en Irak et au Liban, ou encore au Yémen, en Égypte et en Libye. L’argent du pétrole et du gaz a pu financer l’expansion de versions rigoristes de l’islam en Afrique sahélienne. 

Le concept de Moyen-Orient est dérivé du « Middle East Command » institué par l’armée britannique en 1939, dans le contexte de la guerre à venir avec l’Allemagne. L’état-major était établi au Caire et couvrait un théâtre stratégique s’étendant de la Libye au golfe Persique. La France, créatrice du Liban, a toujours distingué une région plus étroite, le Proche-Orient, ou Levant (Syrie, Liban, Israël), du Moyen-Orient (Irak, Iran et péninsule Arabique) sous influence britannique.

Cette différence de carte mentale est le produit de la rivalité franco-britannique qui fut la matrice de la formation des États arabes, aux dépens d’un Empire ottoman sur le recul. L’administration Bush avait imaginé le concept de « Greater Middle East » pour justifier son intervention en Irak, en espérant que la démocratisation imposée d’en haut apporterait la stabilité. Au bout du compte, si Saddam Hussein a été liquidé, est apparu Daech, relais et concurrent d’Al-Qaïda. Les guerres civiles irakiennes et, surtout, syriennes se sont internationalisées très tôt, devenant inextricables. La tragédie syrienne est le dernier échec de la diplomatie occidentale. Israël a laissé l’ennemi syrien s’affaiblir. L’Iran et la Russie ont gagné en influence et semblent maîtres du jeu, en rivalité avec l’Arabie saoudite. Les Kurdes d’Irak ont échoué à conquérir leur indépendance, tandis que ceux de Syrie ont acquis un début d’autonomie malgré les pressions de la Turquie. En Irak, en Syrie, au Yémen, partout se poursuit l’épuration ethnique. De leur côté, les communautés non exilées – chiites et kurdes – se réorganisent sur des bases sécuritaires de peuplements et de croyances homogènes. 

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