C’est la honte qui a poussé Erri De Luca à écrire le recueil Aller simple. La honte que la Méditerranée soit devenue cet espace mortifère. Contre l’hypocrisie des politiques, il rappelle que les lois inhumaines n’empêchent jamais les migrants de migrer : « D’accord, je meurs, mais dans trois jours je ressuscite et je reviens. » 

La mer était une bande en travers, caresse des pieds,
le plus aimable barrage de frontière.

Ce n’était plus à nous, mais au bateau d’aller,
le bagage déchargé des épaules, la mer était soulagement.

Ce n’était plus aux jambes de monter,
pour nous, marcheurs, la mer est un chariot.

La mer pousse, confuse, un jour elle court vers l’est,
un autre elle veut le nord avec ses giclées de lait sur les vagues.

La mer est une girouette, les hommes marins sont des enfants
féroces et amers, d’un orphelinat.

La mer n’est pas un fleuve qui connaît le voyage, mais une eau
                sauvage,
au-dessous c’est un vide déchaîné, un précipice.

Aller simple, traduction Danièle Valin © Éditions Gallimard, 2012

 

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