ON LES APPELAIT les fous. Ils faisaient rire, mais surtout très peur. Leur état ne pouvait avoir qu’une cause démoniaque et nécessitait donc une forme d’exorcisme. Quand les médecins se sont emparés du problème, c’était encore avec l’idée d’extirper du corps le mal qui l’habitait : saignées, vomitifs, lavements, ventouses, pour attirer les humeurs viciées...

En France, la prise en charge de la folie par les pouvoirs publics a officiellement commencé en 1785, avec la publication d’une Instruction sur la manière de gouverner les insensés et de travailler à leur guérison. Les asiles devaient remplacer les maisons de force où ils étaient enchaînés. Les auteurs recommandaient de séparer « les imbéciles, les fous violents, les fous tranquilles et ceux qui ont des intervalles de lucidité », pour éviter les « suites funestes de la contagion nerveuse ». À chacun un traitement approprié.

Pour soigner « la frénésie », il fallait des saignées « grandes et copieuses », entrecoupées de lavements. Les maniaques, eux, devaient être plongés dans un bain chaud, « avec de la glace ou de la neige sur la tête » pendant deux bonnes heures. Et si l’on soupçonnait un virus d’être la cause de la folie, il fallait inoculer la gale à l’intéressé, un poison chassant l’autre... Aujourd’hui, on ne parle plus d’aliénés mais de personnes en situation de souffrance psychique. La folie, en revanche, a retrouvé du crédit, en n’étant plus confondue avec la maladie.

On ne cesse de la célébrer quand elle exprime l’espoir, la passion, l’audace, la créativité, le talent... Selon un proverbe qui colle parfaitement à l’époque, « les fous inventent les modes et les sages les suivent »

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