« L’utopie, pour elle, est une promesse, et non un irréel »
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Pourquoi la Commune de Paris, cette insurrection de deux mois, conserve-t-elle une place si forte dans la mémoire nationale ?
D’abord parce que c’est une révolution populaire, tant du point de vue du soulèvement que de la prise de pouvoir. Rarement dans l’histoire des artisans, des ouvriers, des institutrices ou des artistes ont su renverser le pouvoir, tout en respectant un enjeu démocratique fort, celui de la collectivité, de la collégialité. On connaît mal les hommes et les femmes de la Commune – et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles Louise Michel incarne pour beaucoup ce moment de l’histoire. Il y a un contraste saisissant entre la vivacité de la mémoire de la Commune et l’anonymat de ses participants. Cela s’explique d’abord par la mort de beaucoup d’entre eux durant la répression ou au bagne, mais aussi et surtout par le fait qu’ils n’ont pas laissé de trace individuelle, parce que la matrice de leur action était essentiellement collective. Ces femmes, nombreuses, et ces hommes ont posé des enjeux démocratiques encore précieux aujourd’hui, mais surtout ils ont, en si peu de temps, essayé de les mettre en œuvre, de « changer la vie » selon l’expression galvaudée de Rimbaud : émancipation du capital, solidarités concrètes par les coopératives, les mutuelles ou le partage du travail, organisation de l’art comme bien commun, édification d’une République sociale et universelle… Enfin, il y a l’écrasement de la Commune dans le sang, au bout de deux mois, qui fut terrible. Les historiens se disputent encore pour déterminer le nombre de victimes, de dix à trente mille, au cours de la Semaine sanglante. Mais il faut tout de même se représenter des charniers, un cadavre dans toutes les rues de Paris, ce qui n’a pas d’équivalent historique, sinon la Saint-Barthélemy. Cet écrasement de la Commune si précoce lui a permis de ne pas trahir ses idéaux.
L’aurait-elle fait ?
C’est difficile à affirmer, mais des garde-fous existaient. De la révolution de 1848, trahie par l’écrasement des ouvriers en juin, n’était restée qu’une utopie, utopie que la Commune avait pour but d’accomplir. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y avait pas de tensions, de querelles stratégiques, sur la nature de la démocratie, le besoin d’un Comité de salut public ou d’assemblées populaires, par exemple. Ces questions
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