Dans La Peste de Camus, il est un passage qu’il n’est pas inutile de relire, en des temps incertains. Tarrou, l’un des personnages les plus énigmatiques du roman, s’y dévoile enfin, en racontant une condamnation à mort, à laquelle il lui fut donné d’assister, au sortir de l’enfance. De ce jour-là, explique-t-il, se logea, au cœur de son existence, une révolte jamais éteinte contre la violence. Résumant la leçon de vie qu’il en tira, il conclut que, de ce jour, il n’eut de cesse de « ne pas être un pestiféré ». De quoi donc la peste est-elle la métaphore ? De rien moins que la contagion de ce consentement à la violence, dans lequel Camus n’a cessé de voir et de combattre, sa vie durant, le signe le plus durable et le plus redoutable du nihilisme de notre temps. Rien cependant n’est simple, car il n’est pas facile, dans les temps qui sont les nôtres, de ne pas être un « pestiféré », au sens de cette contagion. Qui peut prétendre que, fût-ce à son insu, il n’aura pas consenti par son silence, son indifférence ou ses choix politiques, à la mort violente, comme les tragédies du XXe siècle en ont donné tant d’exemples ? N’est-ce pas l’épreuve que tout engagement politi

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