Des trois termes étendards de la Grande Révolution : « Liberté, Égalité, Fraternité », l’égalité apparaît comme le plus moderne. Avant la révolte des puritains dans l’Angleterre du XVIIe siècle, l’aspiration à l’égalité n’avait jamais été formellement exprimée par les couches inférieures de la société. La revendication de la « liberté » figure déjà dans le mythe biblique de la sortie d’Égypte, et dans les révoltes d’esclaves à Rome, et l’on peut voir dans la « fraternité » une version moderne de la miséricorde et de la grâce chrétiennes, tandis que le concept d’égalité est apparu dans l’imaginaire humain il y a seulement un peu plus de trois cents ans. Aristote a certes traité de l’égalité, mais il ne s’agissait que de l’égalité entre égaux : autrement dit, de l’égalité entre des hommes propriétaires d’esclaves, et non pas de tout le genre humain. C’est aussi l’occasion de rappeler que non seulement la philosophie grecque, mais aussi les trois religions monothéistes, judaïsme, chrétienté et islam, ne se sont jamais opposées à l’esclavage.

Comment l’égalité est-elle née à l’orée de l’ère moderne ? On peut pointer un ensemble de circonstances : liée à l’amélioration significative des techniques de culture de la terre et à l’introduction de nouveaux dispositifs de production, l’augmentation de la productivité agricole a permis une nouvelle répartition du travail, avec une parcellisation accrue, qui s’est accompagnée d’une mobilité sociale sans précédent. Beaucoup de gens ont vu leur statut et leur situation évoluer considérablement, évidemment pas toujours pour le mieux. Il en est résulté de nouveaux états d’esprit, totalement inconnus des sociétés agricoles traditionnelles dans le reste du monde.

Il faut souligner que l’ordre féodal ne s’est pas désintégré sous le coup de révolutions. La déstabilisation des relations de dépendance et de protection a préparé le terrain pour une série de soulèvements et de révoltes populaires. La détérioration des dispositifs dâ

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