« Vers l’Orient compliqué, je volais avec des idées simples. » Cette phrase du général de Gaulle ouvrant le premier tome des Mémoires de guerre est un rappel au pragmatisme. Dans cette attente insupportable pour les populations de la bande de Gaza sous les bombes, dans cette crainte du pire qui, déjà, a commencé de s’accomplir, dans l’espoir de voir le cauchemar s’arrêter (mais comment ?), bref, dans l’incertitude qui tient lieu de vie et de mort à la fois, il faut s’en tenir aux faits. Non pas qu’ils soient simples (au mieux sont-ils têtus), mais disons qu’ils parlent d’eux-mêmes, et offrent un point d’appui, même fragile, face aux propagandes qui prospèrent de part et d’autre.

Factuellement donc, le 7 octobre, un déluge de roquettes tirées depuis la bande de Gaza frappe Israël, en même temps que des centaines de combattants palestiniens s’infiltrent sur le territoire de l’État hébreu, et tuent. Et massacrent. Hommes, femmes, enfants. Bilan : plus de 1 400 morts, et quelque 200 otages emmenés de force à Gaza.

Depuis cette attaque surprise d’une violence inouïe – « une sauvagerie jamais vue depuis la Shoah », n’hésitera pas à déclarer le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou –, Tsahal riposte par des bombardements répétés et meurtriers. Pour que la peur change de camp. Près de 7 000 morts côté palestinien, des hommes, des femmes, des enfants. Évidemment. Des immeubles et des habitations en ruine. Des accès à l’eau potable détruits. Des conditions de vie impossibles dans ce lieu devenu une souricière irrespirable, même s’il comprend ses échappatoires souterraines, la ville sous la ville, qui ne signifie pas la vie sous la vie.

Et après ? Et maintenant ? Et demain ? Combien de massacres encore, de crimes de guerre au nom du bon droit des uns ou de la vengeance des autres, elle aussi justifiée par le bon droit, la légitime défense ou par les décrets de l’histoire.

Lisez ce numéro, n’en manquez pas une phrase. Tout se tient. La souffrance des Gazaouis. Leur emprisonnement à ciel ouvert. Les divisions du Hamas et le jusqu’au-boutisme de sa branche militaire qui, précise l’historien Vincent Lemire, a planifié seule l’attaque terroriste du 7 octobre. Le jeu dangereux, pour ne pas dire irresponsable, de Netanyahou, choisissant, explique Sylvain Cypel, de soutenir le Hamas à tout prix pour « empêcher la création d’un État palestinien internationalement reconnu ».

Au moment d’imprimer ces lignes, chacun retient son souffle. Gaza, pour Tsahal, pourrait se transformer en piège. Voir les chars et les soldats israéliens massacrer au sol les civils palestiniens serait une image désastreuse en plus d’un nouveau drame humain. Quelques grandes puissances, à commencer par les États-Unis, retiennent le bras armé d’Israël. Mais jusqu’à quand ? 

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