La bataille manquée du partage de l’espérance de vie
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Quel curieux pays, la France, qui arrive à faire de l’augmentation de l’espérance de vie une catastrophe nationale ! Comment en est-on arrivé à ce que les années de vie gagnées depuis 1981 – 9 ans pour les hommes et 6 ans pour les femmes – créent un séisme d’une telle ampleur ? Car, au fond, là est bien la question : comment financer nos retraites de plus en plus longues ? Et comment intégrer au récit de vie que nous construisons pour un temps si long, une nécessité de travailler plus ? Michel Rocard aurait certainement dit : « Gouvernons avec les sociologues plutôt qu’avec McKinsey. »
Il est vrai que la France, à contre-rythme de ses voisins, a continué à réduire la durée du travail jusqu’en 1981. La retraite à 60 ans était une vieille revendication ouvrière, quand la vie de l’ouvrier, à la Libération, durait en moyenne 65 ans – soit moins de 600 000 heures. Un rêve de retraite de cinq ans, donc. Aujourd’hui, nous vivons couramment plus de vingt ans de retraite. La France de 1981 était peu sensible à l’allongement de l’espérance de vie, et aux équilibres économiques… – pensons au « tournant de la rigueur » dès 1983 ! Mais la réduction du temps de travail « brut » a, de ce fait, continué à être un objectif populaire. Rappelons que sur notre espérance de vie moyenne, qui est actuellement de 700 000 heures, travailler 43 ans revient à travailler 69 144 heures. Soit près de 10 % de son existence, bien loin des discours à la Zola qu’ont tenus certains politiques récemment : époque où les travailleurs travaillaient 70 % de leur vie éveillée !
Notre temps « libre » est un sujet extrêmement sensible, réalité qu’un gouvernement gestionnaire n’a pas intégrée à ses courbes financières
Mais depuis 1981 jusqu’à ces derniers mois encore – d’où cette colère de fond qui vient de loin et qui ne retombe pas –, il a manqué à notre pays un débat crucial pour l’avenir de tous : des propositions syndicales et patronales tout autant que politiques sur le partage de l’augmentation de l’espérance de vie entre travail et retraite. Car, une fois la retraite à 60 ans obtenue, il aurait été logique de prévoir une clause de revoyure régulière pour répartir entre travail et retraite, comme le font les Finlandais, les années de vie gagnées au fur et
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