Il y a des réalités que l’on sait, mais dont l’ampleur vous apparaît soudain et vous submerge. C’est ce qui m’arrive un jour de grève de l’hiver 2019 où je traverse Paris pour me rendre chez mon fils, boulevard Ornano. Les rares stations de métro encore ouvertes sont impraticables, les quelques bus en circulation, imbriqués dans les embouteillages. Alors, je me mets en marche, remontant un flot humain dont je peux voir la physionomie se transformer.

À République, tout d’abord. On est à un quart d’heure des boutiques du Marais, à dix minutes des cafés, traiteurs et cavistes de la rue de Bretagne, mais déjà dans une autre ville. Les façades sont les mêmes, mais plus les devantures, ni surtout l’anachronique homogénéité sociale. Le brassage augmente encore gare de l’Est, où des cadres en costume se faufilent entre les types avinés et les commerçants indiens. Passé une improbable concentration de boutiques de robes de mariées et de tenues de soirée pailletées, je me retrouve parmi les migrants à la Cha

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