« Il n’y a pas de Grenelle du mépris »
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Comment les émotions peuvent-elles déterminer les comportements ?
Mon travail est consacré à l’étude de la démocratie, de ses changements et de ses conditions d’avenir. Dans ce cadre, la conceptualisation de nos sociétés est décisive. Je suis parti d’une perplexité et d’un embarras. Depuis des années, l’analyse classique en termes de classes perd de sa consistance. Des notions élastiques ont pris la relève. On s’est mis à parler de peuple, de classes populaires, des catégories à la fois plus larges et plus floues. Depuis au moins une trentaine d’années, un mouvement à bas bruit prenait acte en sociologie du fait que la société n’était plus simplement définie par les conditions objectives, mais par les trajectoires des gens qu’il fallait comprendre dans une lecture dynamique. Puis, il y a eu le choc de #MeToo et des Gilets jaunes. Le premier a montré combien des relations dégradées pouvaient être décisives pour les individus.
Les viols, les phénomènes de harcèlement sexuel, tout cela était connu. Qu’est-ce qui a changé ?
Un point fondamental : le ressenti de ces choses-là. Être violé, être harcelé a toujours été une blessure considérable. Mais le récit social général était ailleurs. Il s’agissait de problèmes individuels. Dès lors que nous vivons dans des sociétés définies par ce que j’appelle l’individualisme de singularité, la société tout entière donne une plus grande centralité à la personne dans son intimité. L’approche est ainsi complètement différente. Dans les relations sociales, l’individu doit compter pour quelque chose en lui-même. Cela change la définition de l’égalité. Parler d’individualisme et de singularité, c’est mettre l’accent aussi sur le fait que c’est à la relation et à la qualité de la relation que tiennent les gens.
Vous parlez des Gilets jaunes comme d’un deuxième choc.
Oui, car on ne pouvait leur donner aucune qualification sociologique. Beaucoup se sont raccrochés à des références déjà existantes. Des historiens ont comparé ce mouvement aux gran


« Il n’y a pas de Grenelle du mépris »
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