Qu’appelle-t-on le peuple ? 

La définition du peuple n’est jamais neutre ni objective. On s’aperçoit que c’est un enjeu de luttes, et qu’elle change constamment depuis l’Ancien Régime. Je fais remonter l’émergence de cette notion à 1750, avant 1789 donc, avec la diffusion de la culture écrite et de la correspondance, avec la naissance d’une opposition qui affronte le pouvoir royal. On assiste à un processus d’émancipation des classes populaires dans un espace public. Apparaît une dichotomie entre une définition politique du peuple – l’ensemble des Français, sauf les nobles –, puis une définition au sens de « classes populaires » qui s’accentuera avec l’émergence du mouvement socialiste. L’image classique du peuple, en 1789, c’est le sans-culotte. Puis le vocabulaire change. En 1848, c’est l’ouvrier. « Chapeau bas devant la casquette », écrit Flaubert dans L’Éducation sentimentale. On entre dans une époque plus contemporaine, où la définition du populaire est liée au monde du travail. Le travailleur, voilà le mot important.

La Commune de Paris va-t-elle encore changer la perception du peuple ?

Non. La rupture se fait avec la IIIe République et la pacification des relations sociales. La grande réussite de ce régime, c’est l’intégration des forces sociales – paysans et ouvriers – au sein de la Nation. Une nouvelle figure dominante du peuple émerge dans les années 1880 : celle du mineur, avec la grande grève d’Anzin en 1884 et la parution l’année suivante du Germinal de Zola. Puis la figure du mineur sera remplacée en 1936 par celle du métallo, ancrée dans le monde de l’industrie et du salariat.

Le sans-culotte, l’ouvrier, le mineur, le métallo… ces archétypes du peuple signifient-ils son unité ?

Non, ce serait une vision trop homogène et unanime. Des contradictions internes au peuple existent et cela pose des problèmes : la figure archétypique qui devient domin

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