« On n’a jamais autant attendu du couple »
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Quelles sont les grandes mutations amoureuses depuis le début du siècle ?
La complexification des parcours constitue le principal changement. Le premier partenaire n’est plus la personne avec qui on décide de partager sa vie. On vit désormais plusieurs histoires, qui constituent autant de chapitres dans le livre individuel des relations de chacun. Cette mutation correspond à une évolution des normes et des pratiques. Et le fait de vivre plusieurs histoires est, en soi, un facteur de changement. Quelqu’un qui s’imagine vivre toute sa vie avec une seule personne n’aura pas du tout la même représentation et les mêmes pratiques de l’amour qu’une personne qui a vécu une séparation, qui sait ce qu’est la déception.
D’où vient cette complexification ?
On distingue plusieurs facteurs, dont certains sont matériels : changement des conditions de vie, évolution du marché du travail, allongement de la jeunesse et ascension sociale des femmes. On a un premier emploi plus tard car on fait des études plus longtemps. Ceci a ouvert une période d’expérimentation, qui a trouvé un équivalent dans la vie amoureuse. Les séparations tiennent quant à elle beaucoup à l’évolution des rapports homme-femme. Les femmes étant économiquement moins dépendantes de leur mari, la séparation est davantage envisageable. Il y a aussi une dissociation entre sexualité et couple. Avant, la sexualité était une conséquence du mariage. Aujourd’hui, ça n’est plus du tout le cas.
L’idée de l’amour romantique a-t-elle été battue en brèche ?
Pas du tout. Si la pratique a énormément évolué, les imaginaires amoureux restent très forts : on vit toujours dans ce modèle de l’amour romantique. D’un point de vue sociologique et historique, c’est une doctrine, une manière de voir le couple qui émerge progressivement au XIXe siècle, avec l’idée que l’on doit non pas s’aimer parce qu’on est mariés, mais se marier parce qu’on s’aime. Pour simplifier : on passe du mariage arrangé au mariage d’amour. Ce modèle de l’amour romantique s’appuie sur l’idée que l’amour est aveugle, singulier, produit du destin. Ces idéaux-là, on ne le dit pas assez, sont toujours très forts. On se sépare de plus en plus, non pas parce que l’on croit moins en la conjugalité mais, au contraire, parce qu’on est plus que jamais exigeant vis-à-vis du couple – raison pour laque
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