Pourquoi abaisser le droit de vote à 16 ans ? Les jeunes eux-mêmes n’en veulent pas, ce sont les sondages qui le disent ! C’est peut-être vrai. Mais est-ce vraiment surprenant, dans une société française qui peine à faire confiance à sa jeunesse, sur une question aussi complexe et peu débattue ? 

Car les préjugés sur les jeunes ont la vie dure.  Si tant est qu’ils s’intéressent à la politique à cet âge, ne vont-ils pas de toute façon voter comme leurs parents ? En 1945, on disait des femmes qu’elles voteraient comme leur mari. Rien de nouveau sous le soleil : l’élargissement du corps électoral a toujours suscité des réticences et son lot de commentaires condescendants.

Bien sûr, la question de la maturité ne peut être éludée. Mais il est intéressant de constater que le législateur a une approche à géométrie variable des seuils de majorité, sans qu’il soit toujours évident d’en comprendre les raisons. Les jeunes seraient ainsi suffisamment matures à 13 ans pour être condamnés à une peine prévue par la loi, jusqu’à l’emprisonnement. À 16 ans, ils peuvent établir un testament. En revanche, il faut avoir 24 ans pour se présenter aux élections sénatoriales. Le droit d’association des mineurs, quant à lui, est accessible dès 16 ans, mais tellement restreint dans son application qu’il en est inopérant. On peut s’étonner de la part importante de responsabilité donnée aux mineurs dans certains domaines et, dans le même temps, des restrictions existantes dans les champs de la participation citoyenne.

La défiance des jeunes envers la politique est souvent évoquée. Mais, sur ce plan, se distinguent-ils vraiment du reste de la population ? Rien ne dit que le droit de vote dès 16 ans créerait de nouvelles légions d’abstentionnistes. Plus optimistes, nous pensons au contraire que cette mesure pourrait stimuler l’intérêt politique chez les jeunes. Le cadre scolaire dans lequel la plupart des jeunes évoluent à 16 ans faciliterait en effet une meilleure socialisation au vote.

La possibilité de se rendre aux urnes dès 16 ans devrait cependant s’accompagner d’une véritable politique éducative dans laquelle les adolescents, les lycéens, les étudiants seraient davantage initiés aux débats et encouragés à se positionner sur des enjeux sociétaux.

Car le droit de vote à 16 ans n’est pas une fin en soi. Au-delà d’un acte de confiance vis-à-vis des jeunes, ce serait une opportunité pour repenser nos politiques d’éducation à la citoyenneté au sein de l’école, et ce dès le plus jeune âge. Son corollaire serait la mise en place d’espaces concrets de participation au sein des collèges et des lycées : simulations d’élection, budgets participatifs, espaces de concertation, etc. En miroir, il s’agirait de sortir des approches habituelles, centrées sur la transmission descendante d’un « savoir civique » au profit d’expériences concrètes de citoyenneté.

Un risque éducatif somme toute mesuré au regard des bénéfices que pourrait en retirer la société. 

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