Les jours de l’avenir se dressent devant nous
comme une file de petits cierges allumés –
des petits cierges dorés, chauds et pleins de vie.

Les jours passés restent en arrière,
une triste rangée de cierges juste éteints ;
les plus proches encore fumants,
cierges froids, fondus et prostrés.

Je ne veux pas les voir ; leur aspect m’afflige,
comme il m’afflige de me rappeler leur éclat premier.
Je regarde, vers l’avant, mes cierges allumés.

Je ne veux pas me retourner pour constater avec horreur
comme s’allonge vite l’obscure rangée,
comme augmentent vite les cierges éteints.

Constantin Cavafis écrivit Cierges à 36 ans. Effrayé par le temps qui passe, lui qui vivait au présent. Car, l’âge venant, le poète fondera son art justement sur les souvenirs de sa jeunesse dissolue. Ressuscitant les étreintes fugitives comme on rallume des cierges éteints, pour éclairer sa vieillesse. 

En attendant les barbares et autres poèmes, traduit du grec par Dominique Grandmont © Éditions Gallimard, 2003

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