Nos dirigeants affrontent la crise sur une base largement nationale alors que ses effets désintégrateurs pour nos sociétés ne connaissent pas de frontières. Et si, au niveau humain, les dégâts sanitaires peuvent n’être, comme nous l’espérons, que temporaires, les bouleversements politiques et économiques qu’a déclenchés cette crise pourraient durer des générations. Aucun pays, pas même les États-Unis, ne peut vaincre ce virus par ses seuls moyens nationaux. En fin de compte, la réponse aux urgences du moment devra s’accompagner d’une vision et d’un programme international collectif. Et si nous ne parvenons pas à mener les deux de conserve, alors nous devrons affronter le pire sur le plan intérieur et extérieur. […]

Les États-Unis doivent engager un effort majeur dans trois domaines. Premièrement, consolider la capacité mondiale de résistance aux maladies infectieuses. Deuxièmement, panser les plaies de l’économie mondiale. Ce programme devra en particulier viser à minimiser les effets du chaos à venir sur les populations les plus vulnérables dans le monde. Troisièmement, sauvegarder les principes de l’ordre libéral universel. […] Mais la pandémie a pointé un anachronisme : la renaissance de la cité fortifiée à une époque où la prospérité dépend du commerce mondial et des mouvements de personnes. Les démocraties doivent défendre et soutenir les valeurs des Lumières. Un retrait général de l’équilibre entre pouvoir et légitimité provoquerait une désintégration du contrat social tant aux États-Unis qu’au niveau international. Pour vaincre la peste du Covid-19, la retenue est nécessaire autant en politique intérieure que dans la diplomatie internationale. Et il faut fixer les priorités. […] Nous vivons une période clé. Le défi historique consiste pour les dirigeants à gérer la crise tout en construisant l’avenir. Un échec pourrait mettre le feu au monde.

 

Wall Street Journal, 3 avril 2020

 

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