Dans moins de trois semaines, les Américains se rendront aux urnes pour choisir qui succèdera à Joe Biden à la Maison-Blanche. Une élection qui apparaît aujourd’hui incroyablement serrée et qui pourrait se jouer à quelques milliers de voix, dans un nombre réduit d’États. On comprend, dès lors, l’importance jouée par les réseaux sociaux dans ce scrutin, huit ans après l’affaire Cambridge Analytica, qui avait vu les données de 87 millions d’Américains revendues par Facebook et utilisées pour favoriser l’élection de Donald Trump. Aujourd’hui, c’est vers la plateforme X, anciennement Twitter, que se porte avec inquiétude le regard des démocrates.

Depuis l’annonce de son soutien officiel à l’ancien président, au cœur de l’été, Elon Musk n’a pas seulement mis sa fortune personnelle au service du mouvement Maga (Make America Great Again). Il a aussi engagé l’influence de son réseau social, racheté pour 40 milliards d’euros en 2022. Repoussant toute tentative de régulation ou de lutte contre les fake news, au nom de la liberté d’expression, Musk avait d’ores et déjà ordonné la suspension de comptes de journalistes critiques à son égard, diminué l’audience des tweets contenant des liens vers le New York Times, et demandé la réintégration de Donald Trump lui-même sur le réseau. Mais, dans cette dernière ligne droite de la campagne, le patron de Tesla et SpaceX, fort de ses 200 millions d’abonnés, s’est fait le principal porte-parole du camp républicain. Et n’a rien fait pour limiter la diffusion des fariboles sur les immigrés haïtiens qui dévoreraient les chats et les chiens des bons Américains, bien au contraire. « Si Trump ne gagne pas cette élection, ce sera la dernière que nous connaîtrons aux États-Unis », assurait-il encore le 7 octobre, dans un entretien-fleuve avec le journaliste ultraconservateur Tucker Carlson.

Elon Musk réussira-t-il à faire battre Kamala Harris et à ramener Donald Trump à la Maison-Blanche ? Nous le saurons au matin du 6 novembre. Mais l’emprise de l’homme le plus riche du monde sur ce scrutin en dit déjà long sur les défis que les réseaux lancent aujourd’hui au débat démocratique. Bien sûr, ces plateformes sociales ne sont pas les premières machines à influencer inventées par l’homme. Mais l’essor de l’intelligence artificielle aidant, elles montrent chaque jour pourquoi elles s’avèrent les plus puissantes et les plus pernicieuses. Autour de l’essayiste Naomi Klein ou du mathématicien David Chavalarias, ce numéro du 1 hebdo vous propose ainsi de plonger dans les arcanes des algorithmes, pour mieux comprendre comment ceux-ci déforment notre vision du monde, intoxiquent nos discussions et favorisent la polarisation et la désinformation. Loin, très loin de l’idéal originel des réseaux sociaux, censés connecter la planète et entretenir le dialogue entre les citoyens. 

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