[Tout-terrain]
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« Chaque siècle a sa marotte ; le nôtre, qui ne plaisante pas, a la marotte humanitaire », écrivait Sainte-Beuve à la fin de la période romantique. L’adjectif avait été employé pour la première fois en 1835 par Lamartine, dans une correspondance, à propos de son « long poème humanitaire ». Ce qui lui avait valu quelques railleries. Mais, à l’époque, le mot n’avait pas le même sens qu’aujourd’hui : il désignait le souci du bien universel de l’humanité.
Désormais, « humanitaire » s’impose dès qu’il est question, pour des organisations ou des États, d’apporter une aide d’urgence à des populations victimes de désastres provoqués par l’homme ou la nature (séismes, épidémies, conflits armés…). Sans être une « marotte », c’est un mot incontournable. Impossible de parler de la situation à Gaza, par exemple, sans l’employer à tout bout de champ. Il n’y a pas seulement des aides, des financements, des acteurs, des couloirs ou des convois humanitaires : on réclame un « cessez-le-feu humanitaire », on organise une « conférence humanitaire », on dénonce une « catastrophe humanitaire ». Les auditeurs d’une radio de qualité ont même pu entendre une excellente journaliste évoquer l’« horreur humanitaire du 7 octobre »…
Il n’y a aucune mauvaise intention dans l’utilisation systématique de cet adjectif tout-terrain, mais cela sonne bizarrement. La machine médiatique fabrique de l’enflure, le compliqué se complexifie, on ne se contente plus de dénombrer les victimes d’une attaque ou d’un bombardement : les pertes humaines deviennent des « pertes humanitaires ». À force d’employer des mots sans se soucier de leur sens exact, les crimes contre l’humanité finiront par être qualifiés de crimes humanitaires.
« Les financements ne sont, hélas, pas à la hauteur des besoins »
Philippe Ryfman
Spécialiste des questions humanitaires sur la scène internationale, politiste et avocat, Philippe Ryfman revient sur la façon dont ce secteur s’est constitué au cours du xixe siècle et sur les grandes évolutions qui ont marqué son histoire. Il présente également un bilan de sa situatio…
[Tout-terrain]
Robert Solé
« Chaque siècle a sa marotte ; le nôtre, qui ne plaisante pas, a la marotte humanitaire », écrivait Sainte-Beuve à la fin de la période romantique. L’adjectif avait été employé pour la première fois en 1835 par Lamartine, dans une correspondance, à propos de son « long poème humanitaire ». Ce qui…
Les principales zones d’intervention
Ces dernières années, l’augmentation de la fréquence, de la durée et de la complexité des crises humanitaires a été telle qu’en 2024, 363 millions de personnes – soit 4,5 % de la population mondiale – requièrent une aide humanitaire pour survivre.