Le provocateur
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Un soir de 1969, alors qu’il avait 33 ans, qu’il enseignait la littérature à l’université de Pennsylvanie et qu’il avait publié trois livres, Roth avait invité ses parents au restaurant pour les préparer à un évènement qui allait certainement les ébranler : la publication de son roman Portnoy’s complaint. Préoccupé par leur réaction, il leur raconta l’histoire : la confession impudique de Portnoy à son analyste, ses problèmes avec les femmes et les aléas de sa vie sexuelle dus à son éducation entre une mère juive excessivement elle-même et un père hanté par les menaces de la constipation… « Ça va faire sensation, vous allez certainement être assiégés par les journalistes, je voulais juste vous prévenir… »
Roth dut attendre la mort de sa mère pour connaître, de la bouche de son père, sa réaction à cette nouvelle. Lorsque son fils eut quitté le restaurant, elle éclata en sanglots et déplora son état mental : « Il a des illusions de grandeur. » Ce qui était au fond bien vu, pas seulement pour celui-ci mais pour tout romancier. Forcément, une mère juive a toujours raison. On n’imagine pas la mère de Faulkner se prendre la tête dans les mains et se lamenter comme ça.
Portnoy est arrivé dans le mouvement de libération et la grande vague d’excitation érotique des années soixante et il n’est pas excessif de revenir sans cesse à ce roman, non en raison de son immense succès, mais parce que, avec le recul, il demeure la matrice de l’œuvre. Le scandale ! Encore faut-il préciser que tout cela se déroulait chez des Juifs américains, pour la plupart originaires d’Europe centrale. Or l’Ashkénaze n’est-il pas le meilleur ami du Juif ? Coupable dès lors qu’il est accusé, mais un coupable à la recherche de sa faute à l’image du Joseph K. du Procès
« Roth est le grand romancier qui tisse le lien entre l’État et l’intime »
François Busnel
Roth était-il un écrivain engagé ?
C’est une question complexe que j’ai souvent abordée avec lui. Il aimait dire qu’il n’était pas un écrivain engagé. Au sens traditionnel de…
[Uchronie]
Robert Solé
Dans Le Complot contre l’Amérique, Philip Roth imagine ce qui serait arrivé si Charles Lindbergh avait été élu président des États-Unis en 1940. Il n’est pas le premier romancier à entreprendre une reconstruction fi…
Destins
Philippe Labro
Tom et Philip. Roth et Wolfe. En huit jours, ils s’en vont, les octogénaires talentueux, raconteurs d’un pays sauvage, contradictoire, fascinant et repoussant, ils s’en vont, ces manieurs d’ironie, dérision, empathie, sarcasme et passion. Ils ne se resse…