Né dans un Midwest qui s’industrialise, Carl Sandburg devint le chantre de toutes les luttes sociales : « le poète de la prairie et de la ville », selon Bob Dylan. « Il a vu combien le changement pouvait être douloureux, expliqua Barack Obama, mais il avait cet optimisme de la frontière, alors il a vu quelque chose de plus à l’horizon. » Le rêve américain. 

 

L’odeur du foin fraîchement fauché et le vent de la plaine ont fait d’elle une femme dont les côtes portaient en elles la puissance des collines, ses mains étaient résistantes au travail et son sein abritait la passion de la vie.

Son homme et elle ont traversé l’océan et les années qui marquaient leurs visages les ont vus marchander avec des propriétaires et des épiciers tandis que six enfants jouaient sur les pierres et rôdaient parmi les boîtes de conserve au rebut.

Un enfant toussait à s’en déchirer les poumons deux autres ont des végétations et ne peuvent ni parler ni courir comme leur mère, un est en prison, deux ont un boulot dans une fabrique de boîtes

Et tandis qu’ils plient le carton, ils se demandent quelles sont cette aspiration et cette gloire désenchantée en eux qui palpitent faiblement quand les lueurs du printemps envahissent l’air ou que la verdure de l’été vire au marron :

Ils ne savent pas que c’est l’odeur du foin fraîchement fauché qui les appelle et le vent de la plaine qui les supplie de revenir et de reprendre la vie à pleines mains, avec vigueur et passion.

 

Chicago Poems (1916), traduit par Thierry Gillyboeuf, Le Temps des Cerises, 2011

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